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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

fait honneur ? — Non, j’aurais pris cette action pour une bêtise de ta part. — Eh bien ! si le maître de ta belle cave a plus d’esprit que toi, il doit trouver les capucins pitoyables. »

Ariste envoya le moine dîner à la cuisine : l’homme, qui avait insulté le peuple dans l’église, entra. Il avait un long vêtement noir, un chiffon de linge autour du col, une grande emplâtre noire sur la tête, sans doute il était blessé au crâne. Mon amant lui fit des politesses, il témoigna au philosophe sa surprise que sa présence lui avait occasionnée dans l’église : — « Il y a longtemps, Monsieur le Comte, que je ne vous avais vu dans cet endroit ; vous ne fréquentez guère nos temples : — Cela est vrai, dit Ariste, que voulez-vous que j’y fasse ? Je ne chante pas, je ne baptise pas, je ne prêche point. Monsieur le Curé, y fréquenteriez-vous si souvent, s’il n’y avait point d’argent à gagner ? Cependant, il y a environ vingt-neuf ans, que je fus à Notre-Dame, c’était à l’occasion de la prise de Philipsbourg, c’est tout ce que je puis me rappeler ; j’étais jeune, j’étais curieux de voir de mes yeux un Te Deum ; on en chantait plus souvent que dans la guerre d’Hanovre. J’aurais cependant été dupe de ma curiosité, et contraint de servir de vis-à-vis à deux présidents à mortier, si je n’avais rencontré là… oh le bon temps, mon cher curé ! Cette actrice était charmante ! — Monsieur, lui dit l’homme noir, vous scandalisez prodigieusement la paroisse ; vous cou-

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