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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

caresser à chaque instant du jour. Le maître de la cave a donc plus aimé le coq que l’homme puisqu’il l’a rendu plus heureux en le rendant capable de plaisirs, et s’il chérit ses créatures à proportion de ce qu’il les a rendues plus parfaites, le coq doit être de ses amis.

Je vis un animal fort laid : ses grandes oreilles me firent reculer, je demandai au philosophe comment on l’appelait. — « Un fréron : — Ton fréron a l’air bien stupide ! » Le fréron se mit à braire. « Ô ciel ! dis-je à mon amant, fais taire cette bête, quel organe détestable ! ses cris affreux me font peur ; pourquoi as-tu chez toi un animal aussi maussade ? » — Il est à mon fermier, ce maître s’est amouraché de ce plat fréron : le croirais-tu, Imirce, que cette bête, malgré son ineptie et sa voix baroque, ait la fureur de censurer la voix harmonieuse des cygnes et le chant délicat des jeunes oiseaux ? »

Je vis deux grands animaux attachés à une petite cave fort jolie ; mon amant les aborda, il me fit trembler : ces animaux, malgré leur grosseur et leur hauteur se laissèrent caresser. Ariste me fit monter dans la petite cave qu’il appelait un carrosse, dans l’instant ces animaux prirent leur course, je crus que nous voltigions dans l’air. À la sortie du château, je rencontrai un homme sur un de ces animaux, un enfant en conduisait cinq à six, un polisson menait un fréron, et le rouait de coups ; ce traitement m’amusait. Le philosophe m’expliqua l’utilité des chevaux, les services qu’ils rendaient à