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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

fait ce tintamarre, me dit-il, afin que nous ayions de l’eau pour arroser nos choux. — Ton maître ne peut-il arroser les choux sans faire tant de bruit ? Ce que tu appelles le tonnerre peut-il donner la puanteur aux hommes ? — Assurément, s’il tombait sur eux ; il en écrase chaque année quelques centaines, il casse nos tuiles, abat nos cheminées, et en veut surtout aux clochers. — Le maître de ta cave ne peut donc faire le bien qu’avec le mal ? s’entend-il avec la puanteur ? Il te donne du pain, encore comment l’as-tu ? pour du pain, il t’expose à un million de malheurs ; quelle idée a-t-il eue de faire sa cave ? mais, toi, pourquoi es-tu tranquille pendant ce bruit ? — Que veux-tu ? je ne puis empêcher les effets de la nature, il faut vouloir ce qu’on ne peut empêcher. — Tu as raison ; mais ce carillon m’épouvante. »

L’orage se dissipa, le soleil reparut plus resplendissant : je demandai au philosophe pourquoi cet astre avait permis aux nuages de le cacher ? « Cet astre, me dit-il, est lui-même la cause du bruit que tu viens d’entendre. — Pourquoi est-il si beau et fait-il tant de mal ? — Il fait bien d’autres ravages, et nos docteurs anglais trouvent encore qu’il est le meilleur possible. »

Un gros oiseau vint se percher sur un arbre, Ariste prit une longue canne, fit du bruit, et l’oiseau tomba à nos pieds. Le bruit et la flamme qui sortirent de la canne me renversèrent ; revenue de ma frayeur, je dis au philosophe : « Tu es bien