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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

se battra avec honneur, dissipera son argent, et quand il sera marié, il réfléchira sur les égarements de sa jeunesse, en plaisantera, et deviendra sage comme un Français. »

Le bonhomme n’entendait pas la marche de notre siècle. « Comment, dit-il, avec humeur, mon fils a des maîtresses ? — Tant mieux, il ne fera pas un sot mariage ; les filles entrent aujourd’hui dans l’éducation et dans la police ; il en faut nécessairement dans les grandes villes et aux jeunes gens pour les déniaiser plus tôt. — Je n’avais point de maîtresse, répondit froidement mon oncle ; c’est sans doute ce qui a été cause que j’ai épousé ma femme qui m’ennuye furieusement ; c’est un fardeau que j’enrage d’être contraint de traîner. — Ah, mon oncle, croyez-moi, laissez la liberté à mon cousin, ne suivez pas les principes de votre philosophe ; la nature est plus sage que lui, elle parle bien mieux au cœur des Hollandais.

« Cette nation sage, qui ne s’est pas encore avisée de faire des traités d’éducation, est si persuadée que la jeunesse a un temps à passer, qu’un Hollandais demande toujours avant de marier sa fille, si le garçon qu’on lui propose a fait des sottises, ou jeté ce qu’on appelle la gourme ; parce qu’ils savent qu’il y a un temps dans la jeunesse, où tous les hommes font des sottises. C’est la gourme de l’âme ; elle attaque le cœur et l’esprit des jeunes gens, comme la teigne et la petite vérole attaquent le corps. Quelques personnes en sont mêmes mar-