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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

de porter le jour de la raison dans l’esprit des gens qui croient au catéchisme de Sens ? Si les choses incompréhensibles aux hommes ne peuvent entrer dans sa tête, qu’il les croie au moins comme les charbonniers, qui ont le talent de croire ce qu’on ne peut comprendre. »

Nous calmâmes les frayeurs du Chinois, et nous avions déjà marqué le jour de son union avec Lucrèce, lorsque ma fille tomba malade. Nous consultâmes des médecins, qui ordonnèrent les eaux de Spa. Je partis avec Xang-Xung et ma fille pour cette ville, où une foule d’Anglais capricieux, de malades imaginaires, vont chercher la guérison des maux qu’ils n’ont point. En moins d’un mois nous vîmes l’inutilité de ces eaux si vantées par les ignorants. La santé de Lucrèce diminuait chaque jour.

La nature, si féconde, si libérale, aurait-elle mis dans un méchant village du pays de Liège, la source de la santé des hommes ? Les Chinois si sages, les Persans si éclairés, les Turcs si raisonnables viennent-ils puiser la santé à la fontaine du Pouhon ? Pensons mieux de la nature ? Cette mère si attentive à nos besoins, si jalouse de notre conservation, a placé dans toutes les provinces des eaux minérales propres aux habitants de chaque climat. Celles de Spa, que les médecins liégeois intéressés et ignorants ont accréditées pour guérir l’imagination de leurs malades, ou pour blanchir leur ineptie, n’ont que la vertu commune de toutes les eaux minérales du monde.