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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

pièce. Le dimanche, vous n’avez point ce vilain mouchoir qui dérobe des choses. Ah ! des choses… mais des choses… hélas !… mon cœur s’en va ! — Est-ce que vous vous trouvez mal, Monsieur Dressant ? Mes appas vous incommodent-ils ? — Non, ma chère Kitty, mais ils m’ont blessé… — Est-ce que vous devez regarder les filles de si près, le diable ne dort jamais. — Je suis terrible, Miss, vis-à-vis du beau sexe, quand je regarde une fille, j’ai l’honneur de lui faire aller mon coup d’œil tout dessus elle ; ça fait toujours que je l’aime, semblant de rien et qu’elle s’en aperçoit comme si rien n’était. »

Kitty regarda son amoureux avec complaisance et lui dit : « Milord Dressant, j’ai l’honneur d’avoir la vertu en recommandation, ne songez pas au moins à me ravir un trésor plus fertile pour les filles que les richesses de la banque…, Mais cependant est-il vrai que vous m’aimez ? — Oui, chère Kitty, je vous adore… tenez sur ma conscience et sur mon filet ». En disant ces paroles, le berger allongea la peau de son gosier, et la montra à sa maîtresse[1].

Dès qu’une fille en Angleterre a vu le filet de son amoureux, elle ne doute plus un moment de sa fidélité. L’amant, soulagé par sa déclaration, ne s’occupa que de vanter ses charmes. « Que vous êtes belle ? lui dit-il ». — Allez. Milord, je suis

  1. La cérémonie d’allonger, ou de prendre avec deux doigts la peau du gosier et la montrer à sa maîtresse est un serment sacré et respecté en Angleterre.