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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

chapeau, tandis qu’il se grattait la tête de l’autre, il lui dit : « Milady Crincrin, je viens pour avoir l’honneur de vous demander la permission de voir votre fille Milady Kitty, et cela en tout bien, tout honneur sur la foi du mariage. » En achevant cette phrase, il rognait avec les dents une corne de son chapeau. La mère, honorée qu’on recherchait sa fille, répondit à ses politesses, et traînant un peu la voix, elle lui dit : « Vous flattez beaucoup fort l’honneur de notre fille, M. Dressant, mais Kitty a les talons trop bas pour vous[1]. » — « Point du tout, repartit Dressant, c’est moi, Milady Crincrin, qui les ai trop courts, et qui serai charmé d’être flatté de la considération que votre fille voudrait que je puisse être son amoureux. — Miss n’a que quatorze ans, elle est bien jeune ! — Cela n’y fait rien, Kitty est comme les jeunes poulets, elle est bonne à mettre en broche. — Cela est encore vrai, répondit la mère d’un grand sang-froid ; au reste, Kitty est digne de vous, du côté de l’honneur, elle est nette comme une perle. Jour de Dieu, il n’y a point un farthing à redire. — Je suis charmé que vous donniez un si bon témoignage de votre fille, c’est un agrément quand on peut contenter ses père et mère, cela n’est point aisé… Pourrai-je avoir l’honneur de voir Miss ? — Allez dans le grenier, elle doit y être à compter du linge, elle se sera peut-être endormie, elle est indisposée. Nous sommes aujourd’hui le 17

  1. Expression anglaise qui signifie qu’elle n’est pas assez riche.