Page:Dulaurens - Imirce, ou la Fille de la nature, 1922.djvu/23

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
13
IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

Un repas frugal est bientôt pris ; nous allons dans le bois : tu chantes ; Philomèle, qui connaît ta voix, te répond déjà ; il t’attendait, il sait l’heure où tu viens chanter, rival tendre, il t’accompagne, non pour embellir la douceur de ta voix, mais pour l’ajouter à la sienne ; tu l’as vaincu, il est glorieux ; tes chants mélodieux ont enivré mon âme, le feu de tes accords a remué ma veine, je compose une chanson aussi gaie que ton cœur ; l’écho la répète, et les bois retentissent de mes vers et de nos feux.

Que tu m’intéresses, Zéphyre… tu gémis… je tremble… Dieux ! quelle pâleur se répand sur ton teint ! la mort… va-t-elle m’ôter la vie avec tes jours ! La douleur t’arrache des cris, que la douceur de tes humides regards veulent rendre moins sensibles à mon cœur… Ciel ! je vais perdre Zéphyre… Ô Dieu de la nature, ne l’as-tu faite si belle et si constante, que pour la montrer un instant à ma flamme !… Ô jour heureux !… quelle joie ineffable enchante mon âme ! tu viens de mettre au monde un tendre fruit de nos amours ; c’est ton image, j’y reconnais ces traits que ta beauté a gravés dans mon cœur, je l’embrasse mille fois, cette chère fille, c’est Zéphyre multipliée… Comment, tu n’es pas seule dans mon cœur, tu te plais de voir mon âme partagée, tu t’applaudis de ces nouveaux sentiments ? Zéphyre, à ta joie, je reconnais une mère.

Voilà, chère Zéphyre, l’histoire de nos cœurs ;