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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

extraire le lait : j’en goûterai, cet espoir a déjà payé tes peines.

Tandis que je suis à défricher mon champ, tu prépares notre nourriture ; à neuf heures, tu accours, tu souris, tu vas me revoir. Dans une corbeille de jonc que nos mains ont formée, tu m’apportes du pain et des fruits ; tu viens me les offrir comme la récompense de mon amour et de mon travail… Assis sous l’ombre du même hêtre, nous mangeons ce pain ensemble ; qu’il est savoureux ! c’est Zéphyre qui l’a fait, et Zéphyre est à mon côté.

Tu retournes à la maison, en regardant à chaque instant derrière toi ; tu marches avec lenteur, jusqu’à ce que tu m’aies perdu de vue. Le corps nonchalamment appuyé sur ma bêche, mes yeux suivent tes pas ; je te vois encore, je te perds, je te revois ; une colline plus haute te montre encore à mes yeux et te dérobe enfin à mes regards ; à midi je reverrai Zéphyre : cet espoir ranime mes forces, je reprends mon travail.

Sans le secours de ces magnifiques babioles qui enrichissent Julien Leroi[1], je t’appris à connaître le cours d’un astre que tu redoutais à Paris. Dans le court espace du temps qui s’envole, nous n’avons que deux instants qui nous intéressent, le midi et le soir ; moments désirés qui doivent me ramener dans tes bras ; je t’ai montré que le soleil paraissait à midi sur le seuil de la porte de notre chaumière,

  1. Fameux horloger.