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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

ma face, tu as ému le sang de mes aïeux, surtout celui d’un père qui a travaillé dans la cuisine d’un duc ; il faut à l’instant que j’apaise leurs mânes irritées par la vengeance que je vais tirer de ton audace » : il me roua de coups, j’échappai heureusement, je sortis de Paris, je demandai mon pain dans les environs de Tours. Je restai quinze jours à Chenonceaux, où je vis l’entrée de M. l’Archevêque.

Les paysans avaient fait des préparatifs pour fêter Sa Grandeur ; et pour la recréer noblement, ils avaient appelé le sieur Bienfait, qui faisait alors danser les marionnettes dans la Touraine. Ce dernier, de concert avec les fortes têtes de Chenonceaux, arrangea l’entrée triomphante de M. de Fleury. On avait tapissé une charrette à deux roues, de tentures de lit de diverses couleurs. Le char était tiré par deux bœufs enjolivés comme celui du Mardi-Gras. On alla à la rencontre de Sa Grandeur, on la fit monter dans sa voiture. Le bailli du village se plaça derrière Monseigneur, en soutenant sur sa tête un parasol de papier vert ; Bienfait précédait le char en sonnant de la trompette. Cette pompe avait l’air de l’arrivée d’un charlatan sur une place publique ; la mine petite et mystique du prélat réchauffait infiniment cette cérémonie.

Le soir, on donna le spectacle des marionnettes à Sa Grandeur. Les paysans avaient une confrérie de Saint-Roch. Ils voulaient obtenir la permission de l’Archevêque, d’exposer le Saint Sacrement le jour

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