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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

chevalier, nous avons vu son jupon, le goût est divin, nous sommes persuadés que quelque magicien de tes ennemis aura métamorphosé ta Dulcinée, comme celle du chevalier de la Manche… Allons, fais donc les choses généreusement ; montre-nous cette princesse de Toboso. »

Les sarcasmes ne finissaient pas ; ces plaisanteries allaient peut-être se terminer par se couper la gorge ; il faut peu de chose pour échauffer notre jeunesse pétulante. Dupéronville prit le parti de plaisanter avec ses camarades. « Oui, messieurs, vous êtes des connaisseurs ; c’est une fille que j’ai trouvée sur le grand chemin, venez en prendre votre part ce soir, je vous prie au souper. »

Les officiers sortis, mon amant envoya chercher une marchande de modes ; en moins de deux heures, elle trouva ce qu’il fallait pour m’habiller. Le chevalier fut surpris des grâces que la parure me donnait. L’heure du souper vint, ses amis se firent annoncer ; mon amant alla à leur rencontre, et leur dit d’un ton plaisant : « J’ai vaincu enfin le Parafaragaramus qui enchantait ma maîtresse ; vous allez la voir dans tout son éclat ; avant, il faut vous avertir que le malheureux magicien vous en voulait à cause de notre amitié ; il a fait avec moi le marché de Sancho ; il vous en coûtera cinq cents coups d’étrivières : j’ai marchandé, ma tendresse ni mon éloquence n’ont pu rien diminuer, le sorcier est un possédé ; il n’a qu’un mot ; mais deux cent cinquante coups d’étrivières à chacun, quelle misère ! vous