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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

« La tragédie n’est pas de mon goût ; il ne faut ni génie, ni esprit, pour mettre un roman en action ; mais il en faut pour faire une comédie. La monotonie de tes tragédies m’ennuie à mourir ; le prolégomène qu’il faut essuyer, ses catastrophes jetées toutes dans le même moule me déplaisent, l’éternelle contexture de cinq actes pour faire pleurer est insoutenable. Pourquoi cette sottise ? est-ce à cause qu’un garçon apothicaire, nommé Aristote, t’a dit qu’il fallait cinq actes pour tirer les larmes du spectateur ? Les contre-sens du sieur Le Kain, ses convulsions, son insensibilité théâtrale, son air fatigué, l’écume qu’il jette, son organe disgracieux, les gestes croisés, tout cela me rend l’acteur et la tragédie détestables.

« La plupart de tes histrions de Paris ne valent rien ; ton Gascon a un organe embarrassé, il grimace ; son geste est trop uniforme, son accent déplaît, il chante trop ses finales, il se ride trop souvent le front et allonge trop le col. Paulin a une voix sonore, il est sans action, sa raideur est fatigante. Blainville remplit avec une sorte d’honneur le rôle de la statue au festin de Pierre. Dubois fait assez bien en riant des récits tristes et sérieux ; il a toujours un pied en l’air, il est très content de lui-même. Il est bien généreux de s’applaudir lui seul. »

Nous vîmes jouer Le Misanthrope ; cette pièce nous plut infiniment ; elle était dans le caractère de notre cave. La finesse de cette comédie est admirable, et