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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE


des lits très malsains, pour les garçons serruriers, menuisiers et cordonniers, à cinq liards par tête. Jérôme fut touché par ma misère ; il me proposa la moitié de son grabat, s’accommoda avec l’hôtesse pour deux liards de plus ; il me procura l’avantage de coucher à ses côtés. M. Jérôme, le serrurier, n’était point appétissant ; au risque de faire beaucoup de tort à mon âme dans l’autre monde, et d’être un peu excommunié dans celui-ci, j’aurais préféré la couche délicieuse et les côtés recherchés de Mlle Hus[1].

M. Jérôme avait le bonheur d’être dans les bonnes grâces de Mme Fricau ; elle avait jeté un coup d’œil de sacrement sur ce monsieur, digne d’une duchesse ; aussi, était-il digne de la vieille veuve, qui, en sa considération, nous avait donné un coin distingué de son grenier. Je n’avais pas un sol pour avoir de la chandelle, les modiques journées de mon ami ne lui permettaient point de fournir à cette dépense ; que faire ? j’imaginai, ma chère Zéphyre, ce que tu vas lire.

Mon hôtesse avait un gros chat ; je fis de la bougie avec le matou. J’arrangeai, en conséquence, une planche sur ma table, où, par le mécanisme artificiel de deux morceaux de bois, je fixai la tête du chat à quatre pouces de mon papier ; ses yeux étin-

    d’un chaudronnier, et en cinquièmes noces de Jean Triboule, sonneur de la paroisse de Clèves.

  1. La plus jolie vierge du Théâtre-Français, mais la plus médiocre artiste après la détestable Mme Le Kain.