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comme une masse dans un fauteuil. Il allait donc falloir exécuter le pacte honteux ; et quelle que fut sa déchéance, le dégoût d’elle-même l’envahit. À cause d’une plainte qui monta du dortoir le plus proche, elle se leva, par habitude professionnelle, et ses yeux tombèrent alors sur une glace. Elle s’y reflétait affreusement pâle, et la voilette à la mode qu’elle portait plaquait des ombres suspectes sur ses traits brusquement vieillis. Elle ôta son chapeau et voulut serrer le tulle dans un tiroir, un bout de carton s’accrocha dans le fin réseau de soie. Elle attira machinalement ainsi une photographie qui la fit tressaillir.

— Lui, fit-elle à mi-voix. Lui ! l’homme que j’ai aimé, qui m’a trompée, et dont j’ai cru me venger. Il devait en effet me hanter à cette minute !

Longtemps, elle songea, le menton dans la paume de sa main droite, et le bras gauche pendant, comme alourdi par le poids de cette image d’homme. Puis, des jours passèrent.

Juillet vidait les quartiers riches, de ses hôtes accoutumés. Élégants et élégantes s’acheminaient à grand fracas de trompe et de sirène vers les plages et les stations thermales. Les scènes avaient éteint leurs herses, parce que les nudités en vogue s’étalaient devant des rampes de province, et, — dans un tourbillon de luxe et d’optimisme, — chacun repoussait le terrible calice que présentait sans trève la politique balkanique.