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les premiers poètes du vers libre

la faire réussir, me disait récemment celui-ci, il eût fallu une œuvre, et la Néva, pas plus que Lassitudes, n’eut cette ampleur. Dumur est certainement trop modeste ; je ne dirai pas que les poèmes de la Néva avaient la valeur décisive des Méditations ou des Orientales ; mais ce sont de beaux poèmes et très supérieurs à une grande partie de la production symbolico-décadente de 1886-1888. L’insuccès de sa tentative, je ne l’explique aucunement par l′insuffisance des poèmes la Néva et de Lassitudes, mais par le vice même du système. À une époque où l’évolution était vers une plus grande liberté, Dumur a voulu, tout au contraire, ramener le vers à des entraves plus rigoureuses : il était d’avance condamné. Il n’en doit pas moins être considéré comme un frères d′armes des vers-libristes, pour avoir combattu pour le grand principe d’une prosodie fondée sur le pied rythmique et non plus sur le nombre des syllabes.

    rompue par le commencement du sixième vers. Et comme je faisais part de cette impression à Dumur :

    « C’est justement ce que me disait Moréas », me répondit Dumur.

    Ajoutons que le système de Dumur n’oblige aucunement à ces monotonies et incite plutôt à des combinaisons d’iambes et d’anapestes qui sont d’un effet musical souvent excellent, mais toujours avec le caractère d’une disposition imposée.