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LA FIN D’ANTONIA

Je vous ai vues,
Éclosions des ailes éperdues !
Oui, sache, je fus celle
Des espérances les plus saintement belles ;
J’aimai, je fus aimée,
Je fus la fiancée
Et puis la femme,
Avec l’attente de l’accomplissement proche dans l’âme.
Et j’appris
Que mon esprit
Avait rêvé plus haut que ce pouvait monter ma vie,
Et que cela ne se pouvait pas,
Aimer et être aimée, et que mes pas
Étaient maudits ;
J’appris
Que le destin interdisait le paradis.

Plus tard,
J’ai vécu dans le triomphe et dans le fard,
Et ma toute-puissance
M’emportait au-dessus de l’existence ;
Oui, je fus reine ;
Devant ma force sereine,
Enfant, s’est courbée l’âme humaine, ,
Et les troupeaux des hommes à mon seuil
Sont venus prosterner leur orgueil.
Chimère !
La gloire la plus haute est mensongère,
Et j’ai connu la vanité