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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

parties découvertes, exposées à la chaleur du Soleil, sont moins denses ; plus denses, au contraire, sont les parties submergées que l’eau refroidit.

« Ce n’est pas le centre de gravité de la terre qui est au milieu du Firmament ; imaginons, en effet, que la terre soit divisée en deux parties d’égale gravité ; la partie que les eaux recouvre unira son effort à celui de l’eau qui l’entoure pour repousser l’autre partie jusqu’à ce que le centre de tout l’agrégat se trouve au centre du Monde…

» L’agrégat total de la terre et de l’eau est au milieu du Monde,… attendu que le centre de gravité de tout cet agrégat est au centre du Monde ; cet agrégat, en effet, est un corps grave et libre de tout empêchement ; il se meut donc jusqu’à ce que le centre de sa gravité devienne centre du Monde. »

De cette proposition essentielle, rapprochons les deux énoncés donnés par Georges de Bruxelles et par Pierre d’Ailly : Pierre d’Ailly

Pierre d’Ailly       Georges de Bruxelles
Quarta conclusio est


quod centrum gravitatis aggre-
gati ex aqua et terra est in
mediofirmamenti ; palet, quia
tale aggregatum est corpus
grave et nonimpeditum ; ergo
movetur quousque centrum gra-
vitatis ejus sit centrummundi.
Consequentia tenet, quia illud
est de natura gravis
.
Dicitur sexto quod totale ag-
gregatum exterra et aqua est
in medio Mundi secundo modo ;
patet, quia centrum gravitatis
illius aggregati est in medio
Mundi, eo quod taie aggrega-
tum est corpus grave et non
impeditum, et sic movetur quo-
usque centrum gravitatis ejus
fiat centrum Mundi
.

C’est évidemment de Pierre d’Ailly que Georges tient la proposition qu’Albert de Saxe avait formulée, puis abandonnée, à laquelle Laplace devait, un jour, donner sa véritable signification.

De cette proposition, Georges conclut, comme toute l’École de Buridan, qu’un mouvement de translation, très lent et très petit, il est vrai, ébranle sans cesse toute la terre. « Continuellement, en effet, certaines parties de la terre s’allègent et d’autres s’alourdissent ; il y a sans cesse, pour la terre, change-