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L’ÉCOLE ASTRONOMIQUE DE VIENNE

Dans cette courte vie, il avait accompli plusieurs œuvres ; la plus importante de toutes, ce fut la formation de Régiomontanus, qui l’allait continuer.

À quatre heures de l’après-midi, le 6 Juin 1436, Jean Müller naquit dans une petite ville nommée Kœnigsberg et sise près d’Hassfurt en Franconie[1]. Le nom latin de Kœnigsberg, Mons regius, lui valut d’être appelé Joannes de Monte regio ou Regiomontanus ; le nom de la Franconie le fit souvent nommer Joannes Francus. Dans ses écrits allemands, il prend, en général, le nom de Johann von Küngsperg.

Après lui avoir donné, dans leur demeure, les premiers rudiments de l’instruction, ses parents l’envoyèrent poursuivre ses études à Leipsig. La Cosmographie, apprise à l’aide de la Sphère de Joannes de Sacro-Bosco, lui inspira le plus vif amour de l’Astronomie ; il se hâta d’acquérir en Arithmétique et en Géométrie des connaissances qui lui permissent de se livrer à sa science préférée. Mais Leipsig ne lui offrait pas les ressources nécessaires pour en approfondir la connaissance ; la renommée de renseignement que Georges de Peurbach donnait à Vienne étant venue à ses oreilles, il se rendit auprès de ce savant maître dont il devint bientôt le disciple fidèle et l’ami très dévoué. Regiomontanus n’a guère publié d’ouvrage important dont la préface n’apporte, à la mémoire de son maître vénéré, un tribut d’hommages.

Il fit sans doute, du vivant de Peurbach, de nombreuses observations astronomiques ; mais il n’en est que trois dont ses écrits gardent le souvenir[2] ; ce sont trois éclipses de Lune qui eurent lieu le 3 septembre 1457, le 3 Juillet 1470, et le 28 Décembre 1470 ; elles lui donnèrent occasion de remarquer, entre la réalité et les prévisions des Tables alphonsines, des écarts très considérables.

Georges de Peurbach avait laissé à son disciple le soin d’achever son abrégé de l’Almageste ; il lui avait révélé, d’ailleurs, tous les défauts de la traduction donnée par Gérard de Crémone ; le Cardinal Bessarion fit comprendre à Regiomontanus qu’il ne pourrait, sur la Grande Syntaxe, accomplir une œuvre :vraiment satisfaisante tant qu’il n’aurait pas acquis la connaissance de la langue grecque ; notre astronome partit donc pour l’Italie avec son puissant protecteur ; sa correspon-

  1. Gassendi Op. laud., éd. cit., pp. 345-346.
  2. Gassendi Op. laud., éd. cit., pp. 347-348.