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LES UNIVERSITÉS DE L’EMPIRE

Touchant le lieu naturel des éléments, écoutons le confus enseignement de Josse d’Eisenach[1] :

« On a coutume de déterminer l’ordre des éléments, et de chaque élément en particulier, au moyen des influences célestes, des qualités premières, des qualités motrices secondes, qui sont la gravité et la légèreté, de la distance ou du voisinage, de la nature propre ou commune, du salut des êtres animés, enfin de la rareté et de la densité des divers éléments. L’élément plus rare doit se trouver au-dessus de l’élément plus dense, afin que les influences célestes puissent atteindre jusqu’au dernier élément, jusqu’à l’élément le plus éloigné ; les éléments les plus rares occupent la place la plus élevée, les éléments les plus denses sont au rang le plus bas, parce que le Ciel influe au loin la vertu qui convient aux corps lourds et, près de lui, celle qui convient aux corps légers. Le lieu naturel des éléments se détermine également par la convenance des qualités, de telle façon que les qualités du lieu soient semblables aux qualités du corps logé. Le Commentateur dit que les éléments, dans leurs mouvements naturels, tendent vers leurs lieux naturels bien plus en raison d’une vertu céleste que d’une vertu élémentaire.

» Dès lors, on peut dire ceci : Une certaine partie de la terre, celle que nous habitons, est découverte, bien que la majeure partie soit sous les eaux ; le lieu que compose, pour la terre, l’ensemble des surfaces concaves de l’air et de l’eau est le lieu naturel de cette terre ; abandonnée à sa nature élémentaire, la terre serait tout entière sous l’eau ; cependant, en vue du salut des êtres vivants, elle est en partie, par une vertu céleste, soulevée au-dessus de l’eau. »

Ce passage semble parfois refléter la pensée de Sunczel ; mais celle-ci brillait de plus de clarté ; en tout cas, le professeur d’Erfurt délaisse toute considération de Mécanique aussi complètement que le professeur d’Ingolstadt.

Un peu plus loin, notre auteur revient sur la même question[2].

« Sur l’ordre du Créateur, dit-il, le Firmament a séparé les eaux d’avec les eaux ; les eaux demeurées sous le Firmament se sont rassemblées en un même lieu, selon ce que Dieu avait disposé, afin que certaines parties de la terre demeurassent non couvertes par les eaux et que les êtres animés pussent

  1. Judoci Isennachensis Summa in totam Physicen ; lib. I, cap. IV, fol. sign. biij, ro.
  2. Judoci Isennachensis Op. laud., lib. II, cap. II, fol. suivant le fol. sign. liij, ro et vo.