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LES UNIVERSITÉS DE L’EMPIRE

ont ceci de commun qu’elles mettent dans la dépendance d’une même Mécanique les circulations célestes et les déplacements des corps sublunaires ; si étranges qu’elles nous paraissent, elles sont beaucoup moins loin de nos modernes pensées que de l’antique doctrine où de pures intelligences semblaient seules capables de mouvoir les astres.

La discussion que nous venons de reproduire ne satisfait pas pleinement son esprit ; de l’arrêt des Cieux après le jour du jugement, il ébauche d’autres explications : « On pourrait dire encore, ce qui revient au même, que dans l’Univers renouvelé, le Ciel demeurera en repos parce que Dieu ne prêtera plus de concours actif à son mouvement ; ce repos, toutefois, ne serait pas violent, car toute créature incline à obéir au Créateur ; mais peut-être un tel repos devrait-il être appelé miraculeux, car cette suspension de l’influence divine paraît miraculeuse. »

Notre auteur poursuit alors en ces termes : « Il y a une autre opinion plus communément tenue ; c’est que Dieu meut le ciel par l’intermédiaire d’une Intelligence créée, d’un ange. » Il expose cette théorie comme il a exposé celle qui tient le mouvement des Cieux pour mouvement naturel. Mais à la fin de cette exposition, nulle conclusion ne vient déclarer des préférences qui semblent bien pencher vers l’antique système des Intelligences célestes.

Esprit indécis, Biel oscille volontiers entre des partis opposés qui ne parviennent pas à fixer son choix ; Summenhart prend, au contraire, des décisions fermes.

Il déclare[1], tout d’abord, « que le Ciel est composé d’une matière et d’une forme ; la matière du Ciel est de même espèce que la matière des choses d’ici-bas ; la forme du Ciel est sujette à la génération et à la destruction ; le Ciel est véritablement susceptible de génération et de destruction… Dans la matière du Ciel, donc, il y a vraiment privation des formes autres que la forme céleste. Certains philosophes, tel Albert au présent ouvrage, et d’autres avec lui, sont dans l’erreur lorsqu’ils croient que la forme du Ciel peut satisfaire l’appétit total de la matière céleste, au point que cette matière n’ait plus aucune

  1. Conradi Summenhart Commentaria in Summam physice Magni, tract. I, cap. IV, secunda difflcultas ; fol. sign. c, col. b.