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LES UNIVERSITÉS DE L’EMPIRE

naturam gravitatis) quand il meut vers le bas, et de légèreté quand il meut vers le haut ; ce goût, il le prend d’une manière accidentelle.

» De même qu’entre la pesanteur et la légèreté il y a différence d’espèce spécialissime, de même les impetus diffèrent entre eux d’espèce spécialissime. La preuve en est qu’un impetus meut vers le haut, un autre vers le bas, un autre encore de côté ; et cela provient des diverses façons qu’a l’instrument de projection d’imprimer l’impetus

» On dit de l’impetus que c’est une qualité imprimée, etc… Ces mots ont trait à la cause efficiente de l’impetus, qui est l’instrument de projection. Plus vite cet instrument meut le mobile, plus fort est l’impetus qu’il lui imprime. — Est ipse proficiens ; quoniam de quanto velocius mobile movet, de tanto fortiorem impetum impressit. »

« Il faut savoir que l’impetus est une qualité d’une nature permanente, puisque c’est une qualité de première ou de troisième espèce. Il en résulte que l’impetus est réellement distinct du mouvement local ; sans doute, il est impossible que l’impetus existe en l’absence du mouvement local, mais la réciproque n’est pas vraie. »

Ces considérations sur la nature de l’impetus rappellent de très près celles que Marsile d’Inghen développait dans ses Abbreviationes libri Phisicorum. C’est encore l’influence de Marsile, et une influence plus malencontreuse, que nous allons reconnaître au passage que voici :

« On demandera peut-être si l’impetus est plus fort au commencement du mouvement ou bien au milieu.

» On répondra qu’il est plus fort au commencement. En effet, c’est dans le mouvement violent qu’on suppose l’impetus ; or il est dit au IIe livre et au IVe livre du Traité du Ciel que le mouvement violent est plus vite au commencement. [Aussitôt après ce début] l’impetus commence à s’affaiblir, parce que la pesanteur du mobile lui résiste et aussi le milieu ; à la fin, il est tellement affaibli qu’il ne meut plus rien.

» On voit par là que l’impetus doit être admis en tout mouvement violent ; il doit être admis lorsqu’un corps pesant est jeté vers le haut ou bien lorsqu’un corps léger est lancé vers le bas ; il doit être également admis lorsqu’un grave est lancé vers le bas plus vite qu’il ne se mouvrait de lui-même…

» Mais vous diriez peut-être, en second lieu : L’expérience montre qu’un objet mû par l’impetus frappe moins fort tout