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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

de Saint Thomas d’Aquin… Nous déclarons que le mot : mouvement ne signifie rien autre chose que le mobile et ce qu’il gagne ou perd. »

Josse d’Eisenach se montre ici fidèle disciple de Gabriel Biel et, par Biel, de Guillaume d’Ockam, le Vénérable Initiateur de l’École nominaliste parisienne.


VI
LES DOCTRINES PARISIENNES EN ALLEMAGNE


Nous avons vu que Gabriel Biel, que Conrad Summenhart, que Frédéric Sunczell, que Grégoire Reisch, que Josse d’Eisenach subissaient tous l’influence de Paris et que, bien loin de chercher à s’y soustraire, plusieurs d’entre eux proclamaient hautement leur admiration pour l’École dont ils étaient les disciples éloignés. Pénétrons maintenant dans le détail de leurs enseignements ; sur quelques-uns des problèmes dont l’École de Paris avait proposé des solutions particulièrement originales, voyons ce qu’ils professaient ; cherchons ce que leurs opinions ont retenu des doctrines des Guillaume d’Ockam et des Jean Buridan.


A. Le lieu


La théorie du lieu, qui, parmi les Parisiens, a fourni le sujet de controverses si nombreuses et si importantes, ne paraît exciter, chez les maîtres allemands, qu’un intérêt fort réduit ; ils ne s’y attardent guère ; ils se contentent de résumer des théories autrefois développées et, de ces théories, ils négligent bien souvent les propositions les plus essentielles et les plus fécondes.

Gabriel Biel évite, autant que faire se peut, de prendre les questions de Théologie pour prétextes à discussions de Physique ; aussi lorsqu’il examine de quelle façon un ange peut résider en un lieu ou se mouvoir de mouvement local<ref>Gabrielis Biel Collectorium circa quattuor sententiarum libros, lib. II, dist. II, quæst. II et III.<ref>, ne dit-il rien sur la théorie du lieu des corps.