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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

(simpliciter) premier, qui est l’empyrée, il n’est en un lieu d’aucune manière ; mais il demeure en repos, car il est subordonné en vue du repos des bienheureux.

» Les physiciens (philosophi naturales) ne connaissaient point cette béatitude ; aussi supposaient-ils que tout ciel est mobile ; ainsi Aristote disait-il que la première sphère céleste même était mobile ; c’est ce qui donnait naissance à la précédente question. »

Il est bien vrai ; en introduisant un ciel empyrée immobile, les théologiens donnaient à la théorie péripatéticienne du lieu un achèvement qu’elle réclamait et que la Physique d’Aristote lui refusait.


C. La rotation de la terre


Lambert ne comprenait pas toujours très bien les théories qu’il prétendait exposer ; il a mal saisi, par exemple, ce qu’Alexandre avait dit du lieu et du mouvement de la sphère suprême ; aussi en vient-il à faire d’Alexandre un partisan de la rotation diurne de la terre ; voici le curieux passage que nous vaut cette méprise[1] :

« La diversité qui provient des divers levers des astres et qui nous est apparente ne conduit pas Alexandre à dire que le Ciel se meut ; il dit que cette diversité provient du mouvement circulaire de la terre.

» Cette opinion est réfutée au second livre du Traité du ciel.

» Mais cette thèse est impossible à tenir. Sans doute, le mouvement diurne, le lever et le coucher du Soleil nous peuvent apparaître en vertu du mouvement de la terre ; mais cependant, le mouvement des planètes dans le Zodiaque ne peut être sauvé par le mouvement de la terre ; certains astres errants, en effet, parcourent le Zodiaque avec plus de vitesse ; telle la Lune qui le parcourt en un mois ; d’autres, comme le Soleil, le parcourent en un an ; et ainsi des autres.

» — Nec etiam dixit cælum moveri propter diversitatem provenientem ex diverso ortu astrorum sicut nobis apparet ; sed dixit ipsam diversitatem pro ventre ex motu terræ circulari ; et ista opinio reprobatur in secundo Cæli.

» Est autem ista positio impossibilis, quia, quamids motus diurnus, ortus et occasus Solis possit nobis apparere ex motu

  1. Lambertus de Monte, loc. cit., fol. lxxix, col. c.