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LES ADVERSAIRES DE L’ASTROLOGIE

» Il nous faut imaginer qu’il en est de même des variations éprouvées par les radiations, semblables aux rayons lumineux, chargés de transmettre les influences des astres aux choses d’ici-bas.

» Voici ce que j’en conclus : Connaître quelle est, à telle ou telle époque, l’influence prédominante parmi celles qu’émettent les corps célestes, cela n’est guère utile ou cela ne sert de rien pour juger quels effets produit à l’avenir dans les choses d’icibas. D’après ce qui vient d’être dit, il se peut faire que cette influence soit affaiblie par la réflexion et la réfraction qu’elle éprouve en raison de la position des choses d’ici-bas qui la doivent recevoir ; partant, qu’elle soit dominée par une autre influence. C’est ce que nous voyons au sujet de l’influence du Soleil ; parfois, en un endroit, la chaleur se trouve être deux fois ou trois fois plus intense qu’en un lieu voisin, parce que, peut-être, au premier endroit, le rayonnement direct s’accompagne d’un rayonnement réfléchi par les objets qui l’entourent…

» Cette connaissance donc vaut et suffit aussi peu à pronostiquer l’avenir qu’en cet exemple : On sait qu’à telle époque, le Soleil demeurera tant de temps au-dessus de notre hémisphère, et qu’il sera fort brillant ; mais on ignore quelle sera, à ce moment, la disposition qualitative des nuées, leur figure, leur situation à l’égard du Soleil ; quelle valeur cela a-t-il pour juger d’avance s’il se produira, à ce moment, un arc-en-ciel, un halo, un périhélie ou quelque phénomène de ce genre ? »

Pas plus qu’Oresme, Henri de Langenstein ne dénie aux astres une certaine influence sur les choses d’ici-bas ; mais pas plus qu’Oresme, il ne croit les astrologues capables de connaître cette influence et les circonstances qui en accompagnent l’opération assez exactement pour en tirer le moindre pronostic véridique.

De plus, à cette influence, notre auteur refuse toute nature occulte et mystérieuse ; il entend l’assimiler de tout point aux actions que les corps d’ici-bas exercent les uns sur les autres en vertu de leur chaleur ou de leur froid, de leur sécheresse ou de leur humidité ; l’étude de cette influence ne doit donc être qu’un chapitre de la Physique spéciale dont il souhaite la construction ; les diverses doctrines de l’Astrologie devront prendre pour modèle la théorie de l’arc-en-ciel ; autant dire qu’elles doivent dépouiller tous les caractères qui marquaient l’Art judiciaire.