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LES ADVERSAIRES DE L’ASTROLOGIE

eux certaines qualités capables d’engendrer le chaud, le froid, la sécheresse, l’humidité ; une de ces qualités est la lumière ; quant aux autres, on admet qu’elles ne tombent sous aucun sens humain ; elles sont enracinées dans la substance céleste, et elles laissent couler hors d’elles-mêmes des qualités d’espèces différentes, »

Cette théorie commune n’est point, assurément, celle qui a la préférence d’Henri de Langenstein ; mais à ceux qui la voudraient admettre, notre auteur montrera qu’on en peut, si l’on veut, tirer des conséquences toutes semblables à celles de l’autre doctrine.

« Admettons, dit-il[1], que les choses se passent comme le veut la première opinion ; cependant, ces influx qu’ils répandent et par lesquels les susdites qualités des corps célestes produisent ici-bas le chaud et le froid, la sécheresse et l’humidité, personne n’a la certitude ni l’évidence qu’ils soient spécifiquement différents des espèces et des radiations émises par les qualités premières formelles… Lorsque, par ses rayons, la chaleur du feu produit une autre chaleur, c’est qu’elle s’accompagne de la production de rayons qui lui sont spécifiquement semblables ; de même pourrait-il se faire que ces mêmes rayons, qui sont ceux des qualités premières, soient aussi bien les effets naturels des corps célestes ou de leurs qualités que les effets des qualités des éléments. »

Selon cette manière de voir, le Soleil posséderait une qualité productive de chaleur qui serait essentiellement différente de la chaleur du feu ; mais les rayons calorifiques que répand la qualité solaire auraient exactement même nature que les rayons calorifiques émis par la chaleur du feu.

« Que deux qualités d’espèces différentes, dont l’une est subordonnée à l’autre, produisent, dans un même patient, des effets semblables, ce n’est point absurde.

» Dès lors, on devrait accorder que ces qualités célestes sont immédiatement sensibles, tout comme la chaleur et le froid ; elles le sont, en effet, par les rayons qu’elles émettent immédiatement et qui sont spécifiquement semblables aux rayons de la chaleur formelle ou du froid formel.

» De la chaleur, du froid, nous apparaîtraient donc dans les astres bien que ces qualités n’y soient pas ; cela n’est pas absurde, car des apparences de couleur se voient souvent là

  1. Henrici de Hassia Op. laud., cap. XI : De modo quo incidunt in rebus inferioribus. Ms. no 2831, fol. 107, ro et vo ; ms. no 14580, fol. 207, col. c et d.