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LES ADVERSAIRES DE L’ASTROLOGIE

feste dans le fer et le porte vers l’aimant — c’est que, sans le secours d’aucune vertu insensible et occulte, elle a été mise, en acte dans le sujet où elle se trouvait en puissance, par les quatre qualités premières, le chaud et le froid, le sec et l’humide, qui résidaient dans l’agent ; immédiatement ou médiatement, toute altération produite ici-bas se ramène à l’opération de ces quatre qualités, contraires deux à deux.

Mais Henri de Langenstein n’entend pas borner cette doctrine et ne l’appliquer qu’au monde sublunaire ; il prétend que l’Univers entier s’y soumette.

« Il nous faut examiner maintenant, dit-il[1], de quelle manière les forces naturelles inférieures sont dans la subordination et la dépendance des influences célestes.

» Au sujet de ces influences, il y a deux façons de dire.

» La première, c’est que ces influences sont des qualités qui ne sont point qualités sensibles, et ne sont point, non plus, espèces[2] de qualités sensibles ; cependant, elles produisent ou sont susceptibles de produire des qualités sensibles. C’est pour cette théorie que tient la philosophie de nos pères.

» La seconde théorie suppose, en premier lieu, qu’il est vain de recourir à un plus grand nombre de moyens pour accomplir ce qui se peut faire à l’aide de moyens moins nombreux, surtout lorsqu’aucune raison ne nous y force.

» En second lieu, elle suppose avec Aristote que, pour les corps soumis à la génération, la corruption et la génération substantielles sont la fin à laquelle tend l’altération qui porte sur le chaud ou le froid, le sec ou l’humide.

» En troisième lieu, elle suppose que, parmi les substances corporelles, il en est pour lesquelles l’altération portant sur les qualités premières a pour but une génération substantielle au sein des substances mêmes qui éprouvent cette altération ; il en est, au contraire, où elle a seulement pour but la génération d’une substance ou d’un mixte au sein d’une substance autre que le sujet de l’altération.

» Elle suppose, en quatrième lieu, qu’en toute substance corporelle, la raréfaction où la condensation viennent seulement après la première altération produite par les qualité premières.

  1. Henrici de Hassia Op. laud., cap. X : De duplici modo ponendi influencias in superioribus. Ms. no 2831, fol. 107, ro ; ms. no 14580, fol. 207, coll. b et c.
  2. On sait que les Scolastiques nomment espèce (species) d’une qualité sensible, ce que cette qualité produit dans un milieu, afin de se transmettre à distance. Ainsi un corps lumineux produit, dans un milieu transparent, une espèce invisible qui, rencontrant un corps opaque, y engendre un éclairement visible.