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LES ADVERSAIRES DE L’ASTROLOGIE

choses qui sont sous la dépendance du Ciel et que la liberté humaine ne peut empêcher, n’est-ce pas folie de les croire, à l’aide des nativités, des interrogations et autres vanités de même sorte, capables de prédire d’une façon certaine ou simplement probable, quoique ce soit du sort des hommes ? »

L’Astrologie médicale, auprès d’Oresme, rencontrera un peu moins de sévérité que la Météorologie fondée sur l’étude des constellations :

« Tiercement[1] de ce qui appartient aux médecins, peut-on bien savoir aucune chose quant aux efïects qui en suivent les cours du Soleil et de la Lune ; et en oultre plus, peu ou néant. »

« Toute ceste tierce partie d’Astrologie, poursuit notre auteur, regarde principalement les efïects de nature, et les autres qui s’ensuivent regardent plus les efïects de fortune. »

Pour celles-ci, Nicole Oresme ne dépassera pas, dans ses condamnations, la limite que F Église catholique n’a pas franchie ; il ne déclarera fausses ou illicites que les pratiques contraires à la doctrine chrétienne :

« La quarte partie, dit-il[2], qui est des nativitez, quant est de la complexion et inclinacion de la personne qui lors est née est possible à savoir de sa nature, mais non pas de la fortune et des choses qui pevent estre empeschées par volenté humaine, desquelles ceste partie parle plus que des efïects naturelz.

» Et voit-on souvent par expérience que deux personnes sont nées en si petite différence que on ne la peut appercevoir, et toutes voies se vont leurs fortunes toutes contraires. Pourquoy je di que ceste partie ne puet estre sceue, ne les règles sur ce escriptes ne sont pas vraies.

» La quinte partie, des interrogacions, et la sixte, des éleccions, n’ont point de raisonnable fondement, et n’y a point de vérité.

» Et de la partie qui est des images, dit Averrois, sur le XIIe livre de la Métaphisique, qu’elle suit et est naissance de corrupcion de philosophie et des fables des païans. Et ce puet entendre chascun qui a vu les livres de Yginus et Aratus qui traictièrent de ceste matière ; ne telz ymages n’ont point d’effect, se ce n’est par art magique ou par nigromance[3]. »

Oresme admet évidemment, comme tout le monde l’a supposé jusqu’à lui, que les astres peuvent exercer sur les choses

  1. Nicole Oresme, Des divinations, ch. II ; Bibliothèque Nationale, fonds français, ms. no 19951, fol. 3, vo.
  2. Nicole Oresme, loc. cit. ; ms. cit, , fol, 3, vo, et fol 4, ro.
  3. nigromance = nécromancie.