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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

nativitati alternis tanquam sibi. Non enim est orbis stans secundum unum modume ; nec unquam erit punctus hore quin removetur proportio que fuit sicut ilia, neque erit. Et aspicientes quidem ananetici (sic) hoc noverunt. »

Ces passages provoquent aussitôt, de la part d’Henri Bate, les observations suivantes :

« Le traducteur dit : Le produit de la multiplication des nombres peut croître â l’infini ; mais les révolutions diverses des corps célestes sont, d’une manière nécessaire, en nombre fini, comme il appartient à une autre partie de la Philosophie de le démontrer. C’est pourquoi il faut nécessairement que des dispositions toutes semblables des étoiles reviennent au bout d’un certain temps. Toutefois, la période de ces retours nous est incompréhensible à cause de l’immensité de ces intervalles. C’est peut-être ce qu’ici, cet auteur a voulu insinuer.

» Non est autem etc. Je ne sais pas pourquoi le traducteur[1], ici, a sali le parchemin en mettant sa propre prose dans le texte et en voulant montrer qu’il sait la Mathématique. — Nescio quare hic translator deturpavit pergamenum ponendo se in textu et ostendendo se scire mathematicam.

» Ne croyons pas, en effet, que la multiple diversité des corps célestes empêche deux quelconques de leurs révolutions de s’accorder (convenire) et d’être commensurables (communicare) entre elles ; [ne croyons pas qu’il en soit de ces révolutions] comme il en est des lignes incommensurables [libris (sic) incommunicantibus] ? qu’Euclide, au Xe livre des Éléments, nomme irrationnelles ou sourdes, à cause de leur impuissance à recevoir une commune mesure (propter impotentiam communicandi). Toutes choses, en effet, sont coordonnées entre elles, comme le dit le Philosophe au Xe livre de la Métaphysique ; et le Commentateur ajoute, à cette occasion : Toutes les actions des corps célestes s’unissent les unes aux autres en la constitution du Monde comme s’unissent les actions des enfants dans la constitution d’une maison.

» Partant, il est absurde de supposer que les mouvements des corps célestes sont entre eux dans des rapports irrationnels ou sourds. C’est ce que Pythagore et les Autres anciens ont entendu dire en parlant de la Musique universelle ; à cette Musique, Platon fait aussi allusion, au Timée et ailleurs ; Chalcidius en traite également, et une infinité d’autres. »

  1. Henri Bate veut sans doute parler du Juif qui avait traduit en flamand l’hébreu d’Aven Ezra. (Voir : première partie, t. II, p. 254.)