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L’ASTROLOGIE CHRÉTIENNE

par lesquelles Avicenne entendait prouver qu’il y a, dans le Monde, rien de contingent :

128 [150] « Si, de sa nature, une chose n’est déterminée ni à être ni à ne pas être, elle ne recevra cette détermination que d’une autre chose qui, à son égard, est nécessaire. »

Après avoir affirmé, en général, qu’il y a, dans le Monde, de la contingence et des agents libres, il convient d’appliquer ces principes à la liberté humaine et de la soustraire à la fatalité astrale ; c’est dans ce but que sont condamnées les propositions suivantes :

133 [152] « La volonté et l’intelligence ne se mettent pas elles-mêmes en mouvement d’une manière actuelle ; ce qui les meut, c’est une cause éternelle, savoir les corps célestes. »

162 [154] « Notre volonté est soumise au pouvoir des corps célestes. »

132 [155] « Quand un médecin veut guérir un malade, c’est l’orbe céleste qui en est cause. »

161 [156] « Les étoiles ont, sur le libre arbitre, des effets occultes. »

S’il est une théorie astrologique qui soit inconciliable avec le libre arbitre, c’est assurément la théorie de la Grande Année ; Plutarque l’avait clairement aperçu et, après lui, Origène l’avait montré ; Etienne Tempier condamnera donc deux propositions qui résument cette théorie :

6 [92] « Lorsque les corps célestes reviendront tous au même point, ce qui aura lieu au bout de 36 000 ans, on verra se reproduire tous les effets qui ont lieu à présent. »

10 [137] « La génération de l’homme est cyclique, car la forme d’un homme revient à plusieurs reprises sur une même portion de matière. »

Affirmer que la volonté humaine est libre, qu’elle n’est pas soumise au pouvoir des astres, c’est dénier aux astrologues le pouvoir de prédire les futurs contingents ; Etienne Tempier frappera donc d’excommunication quiconque affirmera ce qui suit :

167 [178] « À l’aide de certains signes, on sait quelles sont les intentions d’un homme, si ces intentions changeront, si elles seront mises à exécution. Par de telles figures on connaît ce qui adviendra aux voyageurs, si des hommes seront emmenés en captivité, si des captifs seront relâchés ; on sait d’un homme s’il deviendra un savant ou un voleur. »

Par là, se trouvent interdites nombre des interrogations aux-