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L’ASTROLOGIE CHRÉTIENNE

des diverses choses et de diverses fortunes qui ça-desouz aviènent.

» Et por ce avons-nos traitié et compilée ceste partie de Astronomie de touz les anciens escriz que nos avons oïz et veuz, où nos avons mis touz les secrez qui apartiènent à faire jugemenz des divers avènemenz des choses et diverses fortunes qui, cà-desouz, aviènent.

» Et doutons[1] que cest traitiez ne viègne ès mains de aucunes genz qui blasment les autrui escriz quant il ne les poent entendre, et en rechignent, et s’en escharnissent[2]. Et por ce prions-nos que cist traitiez ne soit abandonez comuns à tèles genz nos deimes desuz. »

Puisque « la force des étoiles, qui est en èles deumement assise, s’en entre et se assemble plus tost et plus prestement ès choses qui plus lor sunt prochiènes et plus semblables à ce qui apartient à l’âme », nous devons-nous attendre à ce que cette force des étoiles sollicite l’âme même avec une particulière intensité. C’est ce que notre astrologue va nous déclarer sans ambages ; écoutons-le[3] :

» Comment li maistres doit avoir grant porveance de faire jugemenz.

» Porce que touz li fruiz de Astronomie est en deviser[4] et veoir les avènemenz des choses avant qu’èles soient et qu’èles aveignent, et ce apèle-l-en jugemenz de Astronomie, et la vérité del jugement démostre et aoevre[5] toute la question et toute la fin qui en avendra, por ce que nule error nel aviègne el juger, doit li maistres avoir moult grant porveance et mètre grant diligence en faire jugement.

» Premièrement que la question soit simple et absolue… » Et li offices de celui qui doit jugier est que il doit diligemment entendre la question que l’en li fait… Et qu’il sache bien desploier et récapituler quoi, et cumbien li demandierres mist de paroles en sa question, et cumbien il en entendi, senz ce que il ne mètre riens de soi, ne nul parole, ne nul afaitement[6]. Quar la devine force del célestial cercle esmuet le demandeor à faire la demande, et trait à soi et raporte l’entendement et la pensée de lui par une similitude et une semblableté que il

  1. doutons = redoutons.
  2. s’en escharnissent = s’en moquent, s’en gaussent.
  3. Ms. cit., fol. 63, col. c et d.
  4. deviser = deviner.
  5. aoevre = ouvre.
  6. afaitement arrangement.