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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

tornaie, torne et se muet plus forment el milieu que ès costez, et del grant mouvement eschaufe plus les choses qui li sunt el milieu prochiènes que en costé ; et por ce, li Mondes, el torner que il fait plus forment el milieu, et plus forment se muet, eschaufe plus la terre en mi et l’air qui est plus prochienz desouz lui. »

Notre « astrologien » ne paraît guère soucieux des objections que les théologiens faisaient valoir contre la présence d’hommes dans une région inaccessible où l’Évangile ne leur pourrait jamais être annoncé ; il ne dit pas un mot pour calmer les scrupules d’un lecteur soucieux d’orthodoxie.

S’il lui advient, d’ailleurs, de citer, sur quelque sujet, l’opinion des théologiens, il la mentionne en passant eh comme s’il n’y attachait point d’importance. Ainsi arrive-t-il en ce qu’il dit, aussitôt après le passage que nous venons de rapporter, de la nature des éléments[1].

« Or, dit Syma, qui est apelez Esyodes, que la terre, qui est li centres del firmament, est de visée des autres élémenz par entendement de raison ; et est après, l’aive[2] ; et li tierz, li airs ; li quarz, li feus ; et, el quint leu, une substance resplendissant qui est feus senz chalor.

» Mais porce que il ordène en tèle manière les élémenz, vos volons dire les opinions des philosophes de l’ordenement des élémenz, porce que vos entendez la plus veraie.

» Li théologien si mètent l’aive primes, et emprès la terre, et emprès l’air, el quart leu le feu et le firmament, et, pour le firmament, les aives ; et, el quint leu, mistrent le ciel empireian, où il a splendor senz chalor.

» Li naturiein mistrent primes la terre ; après, l’aive ; Le tiers, l’air ; la quart, le feu. Et aucuns de cels mistrenb le feu desouz la région de la Lune, ès plus prochien lieu ; si que il donent le quint leu as planètes, et au firmament ; le VIe donent au ciel empiréen. Cil dient que le monde se termine de la Lune en aval ; et quanque il a desus la Lune, dient que il est hors del monde, , quar toutes les choses del monde sunt muables, mès, desus la Lune, n’a fors stabilité, ne n’i a point de muableté. »

Que notre astrologue n’ait point l’intention de préférer l’opinion des « théologiens » à celle des « naturiens », nous en avons, un peu plus loin, la certitude ; il traite, en effet, avec

  1. Ms. cit., fol. 9, col. c et d.
  2. aive = eau.