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L’ASTROLOGIE CHRÉTIENNE

cher ; elles lui ont été suggérées, en partie, par les livres d’Hermès Trismégiste qu’il a soin de citer ; en partie, aussi, elles sont issues de la lecture de Macrobe, qu’il ne nomme pas en cet endroit, mais qu’il cite un peu plus loin[1].

Comme Macrobe, l’astrologue de Baudoin de Courtenay tient l’âme humaine pour une partie de la substance céleste que Dieu a mise dans notre corps. Cette âme incorporée est-elle soustraite au gouvernement des cieux ? Plotin ne le pensait^pas, et notre auteur ne dit rien qui sépare, en ce point, son sentiment de celui des Néo-platoniciens.

Notre « astrologien » a suivi l’opinion de Macrobe au sujet de l’origine de l’âme humaine ; il l’a suivie aussi en une autre circonstance ; il a admis que l’hémisphère antarctique de la Terre était habité. Ce n’est pas, il est vrai, à Macrobe qu’il se dit redevable de cette supposition, qui indignait si fort un Manégold ; c’est à Martianus Capella qui, en effet, l’admettait également.

Voici ce que notre auteur écrit à ce sujet[2] : « De l’ordenement del firmament. — Or dirons donques si cum Marcianus commence, en son Astrologie, de la composition del Monde, quar par ce puet estre coneuz li cours des étoiles.

» Li Monde, ce dist, c’est li firmamenz, liquels torne environ la terre isnelment[3] et ravissablement ; laquèle terre est li plus bas de touz les élémenz ; la devise par une raison de cercles, c’est-à-dire que il est devisez en V zones qui devisent la terre en V parties. La première est el milieu de la terre, et si ardenz de chalor qu’èle ne puet estre habitée. Les II qui sont ès chief sunt si froides qu’èle ne puent estre habitées por la grande froidure. Les II qui sunt entre la chaude et les froides sunt habitées ; et les puet-l-en soffrir, parce qu’èles sunt trempées[4] de la méjane[5] qui est chaude et des II froides.

» La raison por que la méjane est si chaude, si est porce que li Solauz, qui est fontaine de toute chalor, court par cèle méjane. Les II sunt froides porce que il ne les touche, fors de costé, et lor vient de loingz sa resplendor senz chalor. A celes qui sunt joste la méjane, vient méjanement, ne de trop loing, ne de trop près, la chalor et la resplendour.

» Et autre raison i a uncore ; quar toute chose ronde, quant èle

  1. Ms. cit., fol. 8, col. c.
  2. Ms. cit., fol. 9, col. b.
  3. isnelment = vite.
  4. trempées = tempérées.
  5. méjanes = médianes.