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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

occasions, qu’elle soient extérieures ou intérieures, ne sont pas la cause nécessaire de notre choix ; par sa raison, l’homme peut soit leur résister, soit leur obéir. »

Bien rares, cependant, sont ceux qui trouvent dans leur raison la force de résister à ces impressions astrales ; le grand nombre se laisse entraîner par elles.

« Ils sont nombreux, ceux qui suivent ces impulsions naturelles ; ce sont seulement les sages, c’est-à-dire le petit nombre, qui ne suivent point les occasions de mal agir. »

« La plupart du temps, dit encore Saint Thomas[1], la multitude suit les inclinations naturelles, car la foule des hommes acquiesce à ses passions ; les sages, toutefois, surmontent les passions et les inclinations dont nous venons de parler. Partant, que l’action se produise dans le sens où incline le corps céleste, cela est plus probable lorsqu’il est question d’une multitude que lorsqu’il s’agit d’un homme particulier, qui peut-être, par sa raison, surmonte cette inclination. Il en serait de même si l’on considérait une multitude d’hommes bilieux ; il arriverait difficilement qu’elle ne se laissât pas entraîner à la colère, bien que cela puisse arriver plus facilement pour un seul homme. »

Quelle conclusion doit-on tirer de là touchant la légitimité des prédictions astrologiques ? Cette conclusion, elle se trouve formulée dans un livre attribué à Ptolémée :

« Voilà pourquoi, écrit Saint Thomas[2], Ptolémée dit dans le Centiloquium :

« L’âme du sage vient en aide aux étoiles. » Et aussi :

« L’astrologue ne pourra, par l’inspection des étoiles, donner des jugements, s’il ne connaît bien la force et la complexion de l’âme. »

Et encore :

« L’astrologue ne doit pas prédire des effets particuliers, mais des effets universels. »

» Car, l’impression des étoiles produit tout son effet dans la majorité des hommes qui ne résistent point à l’impression venue du corps ; mais elle ne le produit pas toujours en tel ou tel qui peut-être, par sa raison, résiste à l’inclination naturelle. »

Voilà donc les astrologues autorisés à donner des prédictions même au sujet de faits où la volonté humaine intervient, pourvu

1. Sancti Thomæ Aquinatis Quæstio disputata de Prooidentia, art. X : Num humani actus a divina Providentia gubernentur mediis corporibus cælestibus.

2. Sancti Thomæ Aquinatis Summa contra Gentiles, lib. III, cap. LXXXV.

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