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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

les corps, comme, d’autre part, la mise en mouvement appartient à l’œuvre du gouvernement divin,… il en résulte que Dieu doit mouvoir les corps célestes par l’intermédiaire de la créature spirituelle… Et en effet, je n’ai pas souvenir d’avoir, dans mes lectures, entendu un saint ou un philosophe nier que les corps célestes fussent mûs par la créature spirituelle. Cette supposition admise, que les anges meuvent les corps célestes, il n’est pas un savant qui révoque en doute cette proposition : Tous les mouvements naturels des corps inférieurs sont causés par le mouvement du corps céleste. Cette proposition est prouvée par le raisonnement des philosophes, l’expérience la rend évidente et les autorités des saints la confirment… Il en résulte donc que tout ce qui se meut naturellement est mû par le ministère des anges qui meuvent les corps célestes. »

Mais[1] « y a-t-il des gens qui aient infailliblement prouvé cette proposition : Ce sont des anges qui meuvent des corps célestes ? » ou, du moins, « a-t-on prouvé d’une manière infaillible que les anges sont les moteurs célestes, une fois admis que Dieu n’est pas le moteur immédiat de ces corps ? — À ces questions, voici ma réponse : Les philosophes, qu’ils soient platoniciens ou ■ péripatéticiens, se sont efforcés de prouver cette proposition par des raisonnements qu’ils regardent comme efficaces ; leurs raisonnements sont fondés sur l’ordre des choses dont il a été parlé précédemment, savoir, que Dieu gouverne les choses inférieures par les choses supérieures ; c’est aussi ce qu’enseignent les saints Docteurs… Si donc ils ne sont pas mûs immédiatement par Dieu, il faut que les corps célestes soient animés et mûs par leurs propres âmes, ou bien qu’ils soient mûs par les anges ; ce second avis est le meilleur. Quelques philosophes, toutefois, ont admis que Dieu ne mouvait pas le premier des corps célestes par l’intermédiaire d’une intelligence, mais par l’intermédiaire de l’âme propre à ce corps ; d’autres ont supposé que les corps célestes étaient mûs par l’intermédiaire d’intelligences et d’âmes. »

« Tous les corps d’ici-bas[2] qui sont engendrés par le moyen dû mouvement sont-ils régis par les anges, auxquels les mouvements des corps célestes servent d’intermédiaires ? Tous ces corps, les anges les produisent-ils par l’intermédiaire des

1. Sancti Thomæ Aquin atis Opusculum X, art. IV et V. — Cf. Opusculum XI, art. IL

2. Sancti Thomæ Aquinatis Opusculum X, art. VI et VII. — Cf. Opusculum XI, art. VIII,

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