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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

dictions les décisions du libre arbitre ; on le laissera libre de porter des jugements sur tous les autres évènements d’ici-bas ; on reconnaître la justesse du principe auquel s’appuie son art ; on l’avertira seulement que l’extrême complexité des circonstances dont il lui faudrait tenir compte lui permet malaisément, de ce principe juste, de tirer des conclusions certaines. Telle paraît être l’opinion de Guillaume d’Auxerre touchant l’Astrologie.

Alexandre de Alès se demande[1], à propos de la création des luminaires et des étoiles. « comment ils sont dans le ciel à titre de signes… En outre, si le soleil, la lune et les planètes^sont signes des évènements qui se produisent dans les choses d’icibas, ne déterminent-ils pas les causes de ces évènements ? Et s’ils sont causes ou signes de ces évènements, desquels le sont-ils ? N’est-ce pas de tous ? »

En faveur du dogme astrologique qui soumet le monde inférieur tout entier au gouvernement des orbes, Alexandre invoque quelques raisons, banales en son temps. A l’encontre de ces raisons, il invoque l’autorité de Saint Jean Damascène, dont il rapporte en entifer le texte que nous avons précédemment cité.

Que les astres soient signes de certains évènements sublunaires, il ne le met pas en doute : « Parmi les signes qui sont au Ciel, il faut distinguer les signes principaux, qui sont dans le Zodiaque, et ceux qui, vers le Nord ou vers le Sud, s’écartent du Zodiaque ; ils sont tous déterminés par des étoiles ; on les nomme images parce qu’ils sont formés par des constellations. On dit qu’ils sont des signes parce qu’ils fournissent certaines indications touchant les choses d’jci-bas. De même, selon la diversité de leur mouvement et de leur disposition relative, les cinq planètes ont une certaine signification touchant^les choses d’ici-bas. Mais ce sont surtout le Soleil et la Lune qui jouent le rôle de signes. »

Mais les astres sont-ils simplement signes des changements qui se manifestent dans le monde sublunaire, ou bien en sont-ils causes ? Saint Jean Damascène avait formellement rejeté cette proposition-ci pour s’en tenir à celle-là ; Alexandre de Alès veut, avec les « philosophes », accorder que les astres sont véritablement causes de certains évènements d’ici-bas ; il ne veut pas, cependant, méconnaître l’autorité de Jean de Damas ;

  1. Alexandri de Alès Summa, pars secunda, quæst. LII, art. II.