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LA CHUTE ACCÉLÉRÉE DES GRAVES

qu’elle vient à faire défaut. La vertu violente est très forte au commencement du mouvement ; elle est assez puissante pour empêcher le mobile de se mouvoir vers son lieu naturel et pour le mouvoir en sens contraire. Plus tard, à la fin du mouvement [ascensionnel], la vertu violente est tellement affaiblie qu’elle ne suffit plus à mouvoir le mobile dans la même direction ; elle suffit seulement à le maintenir au lieu qu’il occupe ; elle lui donne alors un repos violent. En effet, pour empêcher le mobile de prendre le mouvement naturel, il faut une moindre vertu que pour le mouvoir d’un mouvement contraire ; lors donc que la vertu qui violente le mobile est tellement débilitée qu’elle ne peut plus le faire progresser, elle empêche encore le mouvement en sens contraire et oblige le mobile à demeurer en repos. Lorsqu’ensuite la vertu qui violente le mobile devient si faible qu’elle ne peut plus obliger ce corps à progresser dans le sens primitif, ni empêcher le mouvement naturel alors le mobile commence à se mouvoir de son mouvement naturel. Voilà pourquoi la pierre, jetée en l’air, se repose au point de réflexion, à moins qu’elle n’en soit empêchée. La force projetante est cause de ce repos en ce qu’elle ne suffit plus à faire monter le mobile, mais seulement à l’empêcher de quitter le lieu qu’il occupe et de se mouvoir vers son lieu naturel. C’est sans doute ce qu’entendent certains philosophes lorsqu’ils disent que dans le mouvement violent le repos est engendré par défaut, tandis que dans le mouvement naturel, la génération du repos est effective. »

Toutes ces considérations sur le repos violent portent, très profondément imprimé, le sceau de Gilles de Rome.

Venons au passage[1] où Walter Burley explique la chute accélérée des graves. Ce passage débute par une phrase textuellement empruntée à Gilles de Rome :

« Il faut remarquer que le mouvement naturel commence à partir d’un repos violent, tandis que le mouvement violent part d’un repos naturel. Donc, plus le mouvement naturel s’éloigne du repos à partir duquel il a commencé[2], plus ce mouvement devient rapide, par suite de la distance à l’état

1. Gualterii Burlæi Op. laud., lib. VIII, tract. III, cap. III, in quo ostenditur quod motus localis est primus motuum ; éd. cit., fol. sign. DD, col. c. et d.

2. Le texte de Gilles de Rome intercalait ici ccs mots : « Plus il s’approche da centre », qui pouvaient sembler une allusion à la théorie de Thémistius. Burley u effacé ces mots qui prêtaient à confusion.

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