Page:Duhem - Le Système du Monde, tome VIII.djvu/268

Cette page n’a pas encore été corrigée
265
LA CHUTE ACCÉLÉRÉE DES GRAVES

pas l’épaisseur de la masse d’air qui surmonte le grave, mais l’agitation de la couche d’air qu’il a traversée.

La théorie d’Hipparque a sollicité l’attention de notre Averroïste ; comme Gilles de Rome, il l’expose[1] en admettant formellement que le mouvement d’un projectile est entretenu par l’agitation de l’air ambiant ; mais entre les deux mouvements opposés, il hésite fort à placer la période de repos intermédiaire dont Richard de Middleton et Gilles de Rome ont prétendu démontrer l’existence :

« Vous direz peut-être que cette partie de l’air qui, avec la pierre, s’est mue jusqu’au lieu élevé où prend fin le mouvement d’ascension, soutient ce grave en l’air pendant un certain temps. Nous demanderons par quelle cause cet air retient ainsi le mobile ; alors, en effet, que cet air est très aisément divisible et qu’il cède très facilement, il ne paraît pas raisonnable qu’il puisse empêcher la chute du grave... Peut-être faut-il dire ceci : La partie de l’air qui, par violence, a monté en même temps que le grave conserve, pendant une certaine durée, la vertu de mouvoir d’autres parties de l’air, bien qu’en cette partie même, la vertu capable de mouvoir directement le grave ait cessé d’être ; pendant toute cette durée, elle retient le grave en sa position élevée ; lorsqu’en cette partie de l’air, la première de ces deux vertus prend fin, à son tour le grave se meut lui-même et meut cet air. Mais quelle est cette vertu, pourquoi dure-t-elle tant de temps, ni plus ni moins, enfin par quoi est-elle détruite ? C’est ce qui reste à éclaircir. »

Lorsqu’en son commentaire aux Livres des Sentences, Durand de Saint-Pourçain cite Thomas d’Aquin, il le nomme[2] : Sanctus Thomas ; l’ouvrage est donc postérieur à 1323. D’ailleurs, en terminant cet écrit, Durand nous apprend[3] qu’il l’a commencé dans sa jeunesse et terminé dans sa vieillesse : « Scripturam super quatuor Sententiarum libros juvenis inchoaui, sed senex complevi. » Or Durand est mort en 1332. C’est donc après les écrits de Jean de Jandun qu’il nous faut placer le Commentaire aux Sentences composé par le Docteur Dominicain.

1. Joannis de Janduno Op, laud., sup. lib. VIII quæst. XVII : An motus reflexus continuus esse valeat.

2. D. Durandi a Sancto Pqrtiano Super sententias theologicas Pétri Lombardi oommentariorum Libri quatuor, per fratem lacobum Albertum Castrensem ad fldem veterum exemplarium diligenter recognili. Venundantur Parisiis apud loannem Roigny sub basilisco, et quatuor elementis, via ad divum lacobum. 1539. Lib. I, dist. XVII, quæst. VII, fol. 45, col. a.

3. Durandi a Sancto Portiano Op. laud. conclusio Operis ; éd. cit., fol. 324, verso.

  1. 1
  2. 2
  3. 3