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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

mouvement vibratoire (motus tremitus) ; elle serait mue d’un mouvement [alternatif] de dilatation et de condensation, par l’effet d’une certaine espèce de qualité propre à mouvoir de cette manière ; en elle cette qualité aurait pour causes la percussion et la disposition du patient ; à moins que le son ne soit la qualité même qui meut de la sorte.

» Nous voyons donc que ces diverses espèces de qualités propres à mouvoir de mouvement local sont engendrées par les différentes façons dont s’exerce l’action violente. De semblable manière, tout le monde doit admettre que l’action des qualités naturellement actives qui se trouvent diversement combinées entre elles dans un agent naturel peuvent, selon la variété du mode d’application et selon la disposition du patient, développer différentes espèces de qualités naturellement aptes à mouvoir îes corps d’ici-bas. De ces qualités, il en est qui meuvent le mobile vers l’agent, d’autres qui l’en écartent, comme si elles le chassaient loin de l’agent et du moteur. Toutes ces espèces de qualités méritent, aussi bien que la gravité, que la légèreté, que l’impetus, d’être appelées qualités sensibles ; il est bien certain, en effet, que nous les sentons, comme nous sentons la gravité ou la légéreté, savoir, par le mouvement qu’elles produisent. »

À deux reprises, Henri de Hesse a parlé de qualités motrices qui rapprochent le mobile du moteur ; il songeait à la qualité que l’aimant engendre dans le fer ; c’est, en effet, à cette qualité qu’il consacre le chapitre suivant de son traité.

Gravité, légèreté, attraction magnétique, impetus sont choses que notre auteur rapproche les unes des autres comme les diverses espèces d’un même genre ; ce sont, en effet, autant de causes qui déterminent ou entretiennent un mouvement local.

La notion d’impetus, qui porte, au xive sièclee, toute la Dynamique des Parisiens, est une notion très complexe. Nombre des caractères que lui attribuent Jean Buridan, Albert de Saxe, Nicole Oresme, Marsile d’Inghen sont de ceux que nous regardons aujourd’hui comme propres à la force vive. D’autres, parmi lesquels se rangent ceux que Marsile et Henri de Hesse viennent d’énumérer, conviennent à la quantité de mouvement dans une direction donnée, ou bien encore au moment de la quantité de mouvement autour d’un axe. Le progrès de la Dynamique aura pour effet d’analyser cette notion d’impetus, de distinguer les divers éléments qui y sont confondus et de marquer, par des théorèmes précis, le rôle que chacun de ces