Page:Duhem - Le Système du Monde, tome VIII.djvu/216

Cette page n’a pas encore été corrigée
213
LE MOUVEMENT DES PROJECTILES

Ce traité a été paraphrasé, d’une façon assez malheureuse d’ailleurs, par Jean de Murs ; sous ce titre : De ponderibus et metallis, il forme la quatrième partie de l’Opus quadripartitum numerorum[1] auquel le géomètre normand mit la dernière main, comme il nous l’apprend lui-même, le 13 novembre 1343.

Ce même texte a été cité par Albert de Saxe[2] en ses questions sur le De Cælo d’Aristote.

Enfin, au début du xve siècle, Blaise de Parme l’a cité à son tour[3] et s’en est inspiré dans la rédaction de la troisième partie de son Tractatus de ponderibus.

Tous ces traités définissaient la notion de poids spécifique, qu’ils nommaient gravitas secundum speciem ; ils enseignaient à comparer les poids spécifiques des divers corps soit par la méthode dite de la balance hydrostatique, soit à l’aide de l’aréomètre.

Nul doute que Jean Buridan n’ait, en son esprit, rapproché la notion de densité, au moins pour les solides, les liquides et les gaz, de la notion de poids spécifique, si bien élucidée au temps où il enseignait ; nul doute qu’il n’ait admis l’égalité entre le rapport des densités de deux corps et le rapport des poids spécifiques de ces deux mêmes corps. Voilà pourquoi, dans la question dont nous avons reproduit la traduction, nous le voyons unir, comme synonymes, les deux adjectifs : densum et grave, et, aussi, les deux adjectifs : rarum et leve.

On pourrait donc très certainement traduire en langage moderne ce que Jean Buridan pensait de l’impetus communiqué à un projectile pesant en disant que l’intensité de cet impetus était égale, pour lui, au produit de trois facteurs : une fonction croissante de la vitesse, le volume du corps, et une densité proportionnelle au poids spécifique.

À ce produit de la densité par le volume, donnons sans hésiter le nom de masse. Newton ne proposera pas, de la masse, une

1. Quadripatitum numerorum Magistri Johannis de Mûris (Bibliothèque nationale, fonds lat., Ms. no 7190).

2. Quæstiones subtilissimse Magistri Alberti de Saxonia in libros De Cælo et Mundo ; lib. I, quæst. III.

3. Tractatus de ponderibus secundum Magistrum Blasium de P arma. (Bibl. nat., fonds lat., Ms. no 10252.)


    ce texte était extrait du Ms. Db, 86 de la Bibliothèque de Dresde, où il porte le titre De insidentibus aquae.

    a) Metrologicorum seriptorum reliquiæ. Éd. F. Hultsch, Lipsiæ, 1866 ; vol. Il, pp. 96-200.

    b) Maximilian Curtze, Ein Beitrag zur Geschichte der Physik im 14. Jahrhundert. (Bibliotheca Mathematica, 1890, p. 43)

  1. 1
  2. 2
  3. 3