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LE MOUVEMENT DES PROJECTILES

Cette théorie fait l’objet de la douzième question posée à propos du huitième livre de la Physique d’Aristote[1].

Cette question est ainsi formulée : « Le projectile, après qu’il a quitté la main de celui qui le lance, est-il mû par l’air ? Sinon, par quoi est-il mû ? »

En la table qui se trouve, dans le manuscrit, au début du huitième livre[2], les matières traitées en cette question sont énumérées dans les termes suivants :

« Duodecima questio. Utrum projectum post exitum a manu projicientis moveatur ab aere, vel a quo moevatur ? Quare longius projicio lapidem quam plumam vel tantumdem de ligno ? Quod movetur ab impetu ei impresso a motore. Quare motus naturales gravium sunt velociores in fine quam in principio. An oportet ponere intelligentias ad movendum corpora celestia ? Que res est ille motus ? Quare pila de choraf ?) longius refiectitur quam lapis uelocius motus ? »

Ce sommaire donne, dès l’abord, une idée de la gravité des problèmes qu’aborde Buridan en cette partie de son œuvre. Les solutions qu’il propose de donner à ces problèmes font de cette douzième question l’un des monuments les plus imposants de la Science médiévale. Aussi croyons-nous devoir en donner la traduction textuelle et complète. Deux courts passages seront seuls omis ; ces passages, nous les retrouverons aux deux chapitres suivants et nous en verrons l’extrême importance.

« Il paraît », dit Buridan, que le projectile, après avoir quitté la main qui le lance, « ne peut être mû par l’air ; l’air, en effet, qui doit être divisé par ce projectile, semble plutôt résister à son mouvement.

» En outre, vous direz peut-être que celui qui lance le projectile meut, au début du mouvement, non seulement ce projectile, mais aussi l’air voisin, et que cet air ébranlé meut ensuite le projectile jusqu’à une certaine distance. Mais, à cela, on fera cette réponse : Qu’est-ce qui meut cet air après qu’il n’est plus mû par celui qui lance le projectile ? La difficulté est la même pour cet air que pour la pierre projetée.

» Aristote, au VIIIe livre du présent ouvrage, soutient l’opi-

1. Magistri Johannis Buridam Questiones octavi libri physicorum. Queritur 12o utrum projectum post exitum a manu projicientis moveatur ab aere vel a quo moveatur. Bibliothèque Nationale, fonds latin, ms. no 14723, fol. 106, col. a, à fol. 107, col. b. — Acutissimi philosophî reverendi Magistri Johannis buridani subtilissime questiones super octo physicorum libros Aristotelis… Parisiis, MDIX. Fol. cxx, col. b, à fol. cxxi, col. b.

2. Ms. cit., fol. 95, col. b.

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