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LE MOUVEMENT DES PROJECTILES

cette forme dure, le mouvement peut se poursuivre dans le vide ; lorsqu’elle vient à manquer, le mouvement s’arrête. »

Il ne semble pas que Bonet admette la théorie qu’il vient de décrire ; un peu plus loin[1], en effet, il se propose d’expliquer pourquoi le mouvement violent est, vers la fin, plus lent qu’au commencement ; voici ce qu’il dit à ce sujet :

« Jamais, dans le mouvement violent, les parties de l’air ne mouvraient violemment la pierre vers le haut, si le grave ne les avait, tout d’abord, mises en mouvement en divisant continuellement l’air. Que le grave, donc, cesse de diviser l’air, d’en mettre en mouvement les diverses parties, et ces parties cesseront, à leur tour, de mouvoir le grave. Comme, vers la fin du mouvement violent, le grave meut les parties de l’air avec plus de lenteur et de faiblesse, ces parties, mues plus lentement, meuvent plus lentement. Voilà pourquoi le mouvement violent est, vers la fin, plus lent qu’au commencement. »

C’est parler en homme qui explique le mouvement des projectiles à l’aide de l’ἀντιπερίστασις ; et c’est bien aussi cette hypothèse que recevait François de Meyronnes.

De la nouvelle théorie du mouvement des projectiles, nous venons d’entendre faire mention par deux physiciens qui ne l’adoptent pas. Au contraire, dans la très courte allusion que Jean le Chanoine fait à cette hypothèse, c’est le langage d’un partisan convaincu que nous reconnaissons.

Les Questions sur la Physique de Jean le Chanoine ont été écrites alors que Gérard d’Odon était maître général de l’ordre franciscain, donc entre 1329 et 1342. Afin de réfuter les objections que le Péripatétisme élevait contre la possibilité du vide, Jean le Chanoine, en une de ces questions, écrit ce qui suit[2] :

« Quant au mouvement des projectiles, je dis que, par suite du manque de résistance, il se ferait mieux dans le vide que dans le plein. Lorsqu’on dit : le projectile ne trouverait pas dans le vide de quoi être mû, comme il le trouve dans le plein, je réponds que le projectile est mû naturellement par la vertu

1. Nicolas Bonet, loc. cit., ms. no 6678, fol. 150, vo ; ms. no 16132, fol. 118, col. b.

2. Joannis Canonici questiones super VIII lib. phy. Aristo. perutiles : nuperrime correcte et emendate : additis textibus Commentorum in margine : una cum ufili Repertorio cunctorum anctoris notabilium indice. Colophon :… Venetiis mandato heredum quondam domini Octaviani Scoti civis ac patricij Modoetiensis : et sociorum. Anno a dominica incarnatione 1520 die 8 Maij. Lib, IV, quæst. IV, fol. 43, col. a.

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