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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

a exercée sur celle de Graziadei ; cette influence a été particulièrement puissante dans le cas qui va nous occuper.

Dans son commentaire au quatrième livre de la Physique, Graziadei consacre toute une leçon, la XIIe, à traiter ces trois questions :

Les causes particulières qui résident dans le monde des êtres soumis à l’action et à la passion peuvent-elles produire le vide ?

L’action d’une intelligence créée peut-elle faire un espace vide ?

Le vide, enfin, peut-il être produit par la puissance de la Cause première ?

À la première question, voici la réponse de notre auteur[1] :

« Le vide ne peut être produit par l’action d’aucune cause génératrice particulière.

» Pour comprendre cette réponse, il faut considérer ceci : Toutes les choses qui se trouvent dans la sphère des êtres soumis à l’action et à la passion concourent naturellement entre elles, grâce à la cause génératrice universelle qui est le ciel, enveloppe de toutes ces choses. Réunir des choses entre elles, cela revient à les. tirer pour qu’elles demeurent connexes, à agir afin d’éviter que quelque séparation ne vienne à tomber entre elles ; nécessairement, donc, la cause génératrice universelle agit pour empêcher toute interruption au sein de la sphère où régnent l’action et la passion. Puis donc que le vide implique séparation et suppression de la connexité, il est nécessaire que Faction de la cause génératrice universelle et naturelle s’oppose à la formation de tout espace vide dans cette sphère ; et comme un agent naturel agit toujours de tout son pouvoir, nous devons conclure que la cause génératrice universelle, qui est un agent naturel, agit de tout son pouvoir pour empêcher le vide dans la sphère des êtres sujets à l’action et à la passion.

» Cela vu, voici une seconde considération : Si deux agents sont tels que la force de l’un soit beaucoup plus puissante que la force de l’autre, si l’un d’entre eux agit dans un sens et l’autre en sens contraire, l’effet qui se produira est celui en vue duquel l’agent doué de la force la plus puissante agit de tout son pouvoir. Mais, de toute manière, la cause génératrice universelle passe en force tout agent particulier ; il agit, d’ailleurs, de tout son

1. Preclarissime questiones littérales édité a frafre gratiadeo esculano… super libros Aristo de physico auditu… Lib. IV, lect. XII, quæst. I ; éd, Venetiis, 1503, fol. 49, col. c et d.

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