Page:Duhem - Le Système du Monde, tome VIII.djvu/135

Cette page n’a pas encore été corrigée
132
LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

Saint Thomas d’Aquin avait lu le commentaire d’Albert le Grand ; nous reconnaissons, en effet, un souvenir très net de ce commentaire dans le passage que voici :[1]

« Ils démontrent encore que l’air est doué de force en pompant l’eau dans des clepsydres, c’est-à-dire dans des vases qui ravissent (furantibus) l’eau ; en effet, dans ces vases, en même temps que l’air est attiré, l’eau est également1 attirée. En outre, l’entrée de l’eau y est empêchée à moins que l’air n’en sorte. »

Si Thomas d’Aquin a lu Albert le Grand, il ne paraît pas, en revanche, qu’il ait lu le Traité De inani et vacuo. De ce que son maître avait emprunté à ce traité, il n’a rien gardé.

Au contraire, dans l’œuvre d’un disciple immédiat du Doctor communis, nous allons reconnaître un emprunt probable à ce traité.

Saint Thomas d’Aquin n’avait pas achevé son commentaire au Traité du ciel d’Aristote ; après la VIIIe leçon du troisième livre, il avait laissé tomber la plume. Son fidèle élève, Pierre d’Auvergne, termina ce commentaire. C’est dans l’addition de Pierre d’Auvergne que nous trouvons ce qui suit[2] :

« Que l’on prenne un vase creux dont l’orifice soit plus étroit que le fond ; qu’on y introduise une chandelle allumée ou bien encore qu’on en chauffe fortement le fond ; puis, qu’on le renverse de telle façon que l’orifice en soit plongé dans l’eau ; l’eau est attirée vers le haut, hors de son lieu naturel. Au contraire, si le vase était appliqué de la même manière à de la terre, la terre ne s’élèverait pas.

» La cause du premier effet peut être la suivante. Par la chaleur de la chandelle ou encore par la chaleur du vase embrasé, l’air qui se trouve dans ce vase est raréfié et transformé en feu ; transformé en feu et mû vers le fond du vase, il se contracte en un moindre volume, et cela pour deux raisons », dont nous passerons le très illogique détail.

« Un signe de cette condensation de l’air peut être le suivant :

1. Sancti Thomæ Aquinatis Expositio in libros physicorum Arisiotelis ; lib. IV, lect. IX.

2. Libri de celo et mundo Aristotelis cum expositione Sancti Thome de Aquino et cum additione Petri de Alvernia. Colophon : Uenetijs mandato et sumptibus Nobilis virî domini Octaviani Scoti Civis modoetiensis. Per Bonetum Locatellum Bergomensem. Anno a salutifero partu virgînali nonagesîmoqumto supra millesimum ae quadringentesimum. Lib. IV, text. comm. 39, fol. 74, coll. c et d.

  1. 1
  2. 2