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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

monte et un corps léger descend ; on le voit par l’eau qui monte dans un vase après que l’air y a été transformé (aere corrupto) et aussi de l’eau qui monte dans la clepsydre et dans la chantepleure (in clepsedra et cantaplora). »

Comme Nicolas Bonet, Walter Burley rapproche la clepsydre de la chantcpleure ; il nous donne, en outre, la description de ces instruments.

« Le second signe par lequel on prouvait que l’air est quelque chose, c’est, dit-il[1], le suivant : On prenait un certain instrument ou vase que l’on appelait clepsydre ou chantepleure[2] ; ce vase a plusieurs trous ; l’un de ces trous est en haut et l’autre en bas. Si ce vase est rempli d’eau et si l’orifice supérieur est bouché, de telle sorte que l’air ne puisse entrer d’aucune manière, on peut ouvrir l’orifice inférieur sans que l’eau s’écoule par cet orifice ouvert au bas du vase. Mais si l’on ouvre l’orifice supérieur, l’eau s’écoule par le trou ou par les trous inférieurs ; et l’on voit alors que l’air entre par l’orifice supérieur. Par suite, donc, de la rentrée de l’air, l’eau s’écoule ; auparavant, elle ne pouvait s’écouler, parce que l’air ne pouvait entrer ; il apparaît, par là, que l’air est quelque chose, car il faut que la cause de cet écoulement soit quelque chose. »

Burley connaît donc deux instruments propres à faire l’expérience dont il parle ; l’un présente, dans le bas, un seul orifice et l’autre en porte plusieurs. Or Philon emploie successivement ces deux sortes de vases ; le premier lui sert à montrer que l’air est un corps, le second à réaliser l’expérience que Burley vient de décrire. Burley pouvait bien emprunter au commentaire d’Averroès les mots clepsydre et chantepleure ; mais la description de ces instruments ne s’y trouvait pas ; il est probable que, directement ou indirectement, Burley la tenait du Tractatus de inani et vacuo.

Les physiciens de la première moitié du xive siècle ont donc connu le Tractatus de inani et vacuo. Remontons plus haut dans le passé ; nous pourrons, croyons-nous, décéler la présence de ce livre aux mains d’Albert le Grand.

Voici-un passage[3] de la Physique d’Albert :

« On prouve que Fair est un corps et non point rien du tout,

1. Burleus Super octo libros physicorum ; lib. IV, tract. II, cap. I ; éd. Venetüs, 1491, toi. sign. n 2, col. a.

2. L’édition citée porte : tantaphora, au lieu de : cantaplora.

3. Alberti Magni Liber physicorum, lib. IV, tract. II, cap. I : Quod physicî est tractare de vacuo et quibus rationibus probatur vacuum esse, et quibus non esse, ab antiquis ; et illi qui dicebant vacuum non esse contradicebant ad problemata.

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