Page:Duhem - Le Système du Monde, tome VIII.djvu/129

Cette page n’a pas encore été corrigée
126
LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

» En effet, une partie de l’air, ayant été changée en la nature du feu, se meut vers le haut ; alors, elle est suivie par le corps qui se trouve au-dessous, que ce soit de l’air ou de l’eau… Au moment où l’on met dans l’eau l’orifice du vase, cette partie ignée s’élève vers la partie supérieure du vase… ; le vase n’est plus rempli ; c’est pourquoi l’eau suit dans l’espace vide. Un jour, j’ai brisé un vase que j’avais ainsi placé sur l’eau, et j’ai trouvé de l’eau attachée aux parois du vase. C’est aussi la cause de ce qui advient dans les ventouses où l’on met du feu ; et c’est la première cause de l’ascension de l’eau.

» Il y a une seconde cause que donne Alexandre. Après que la partie ignée de l’air aura été éteinte, l’air se refroidira, il occupera moins de place, et il attirera l’eau par la nécessité qu’il n’y ait pas de vide (de necessitate vacui). »

Il semble que cette explication donnée par Averroès doive beaucoup à Philon.


II


L’impossibilité du vide et l’expérience (suite). L’influence du traité DE INANI ET VACUO sur la Scolastique chrétienne


Instruite par les Arabes des expériences propres à démontrer l’impossibilité du vide, la Scolastique latine s’est vivement intéressée à ce genre de preuves. Nous nous proposons d’examiner sommairement comment elle les a connues et par quelles réflexions elle en a fécondé l’enseignement.

Il y aura intérêt, comme on le verra tout à l’heure, à ne pas suivre l’ordre chronologique pour exposer l’histoire de ce chapitre de Physique expérimentale. Nous plaçant d’emblée au milieu du xive siècle, nous allons rapporter, tout d’abord, ce qu’en ont dit Jean Buridan et son disciple Marsile d’Inghen.

Jean Buridan affirme la valeur de ces démonstrations expérimentales : « En Physique (In Scientia naturali), dit-il[1], il faut accorder comme un principe toute proposition universelle, qui

1. Johannis buridani Subtilissime questiones super octo phisicorum libros ; lib. IV, quæst. VII, fol. lxxiii, col. c.

  1. 1