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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

daient nullement comme nécessaire que tous les graves y tombassent avec la même vitesse.

Il est, du moins, une proposition qu’ils ne pouvaient guère se refuser d’admettre, et c’est celle-ci : Des graves de volumes différents, mais de même substance, doivent tous tomber dans le vide avec la même vitesse.

Cette proposition, ils étaient pressés de l’adopter par l’une de ces règles de la Dynamique péripatéticienne qu’Aristote avait formulées au septième livre de la Physique. Parmi ces règles, il en est dont Buridan et ses disciples avaient reconnu la fausseté ; mais il en est une, en particulier, que leur critique avait laissée intacte, et c’est de celle-là que nous voulons parler. Marsile d’Inghen, qui venait d’en condamner plusieurs autres, l’énonce en ces termes[1] :

« Si un moteur meut un mobile avec une certaine vitesse, une partie du moteur mouvra une partie du mobile avec la même vitesse, pourvu que ces deux parties, celle du moteur et celle du mobile, soient dénommées de même… Si l’on objectait que la force du moteur doit être moindre, parce qu’une force unie est plus puissante que la même force divisée, on ferait cette réponse : Si la force du moteur était plus puissante à cause de son union, il en serait de même de la force du mobile, et de part et d’autre demeurerait la même proportion. »

Cette règle, Marsile lui accorde pleine confiance ; pour réfuter d’autres règles de Dynamique, qu’il regarde comme fausses, il l’invoque[2] ; il rappelle qu’une moitié du moteur meut une moitié du mobile avec la même vitesse que le moteur entier communiquait au mobile entier ; il répète cet énoncé d’Aristote : Si divers moteurs meuvent divers mobiles d’un certain espace en un certain temps, l’ensemble de tous ces moteurs meut l’ensemble de tous ces mobiles du même espace dans le même temps.

Albert de Saxe, d’ailleurs, avait donné l’exemple à Marsile d’Inghen ; après avoir montré la fausseté de plusieurs des lois de la Dynamique péripatéticienne, il écrivait[3] :

« Il y a encore cette autre règle d’Aristote : Si une certaine puissance meut un certain mobile, la moitié de cette puissance

1. Joannis Marcilii Inguen Quæstiones super octo libros physicorum ; lib. VII, quæst. VIL

2. Joannis Marcilii Inguen Op. laud.t lib. IV, quæst. X.

3. Alberti de Saxonia Quæstiones in libros physicorum, lib. VII, quæst. VIII.

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