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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

et un autre le ralentir ; ainsi arrive-t-il qu’un mobile accélère plus vile (intendit velocius) son mouvement et un autre plus lentement ; la même chose peut arriver pour des corps qui ralentissent leur mouvement. De même, donc, qu’en un mobile qui part du repos, on peut imaginer une latitude de vitesse (latitudo velocitatis) qui monte indéfiniment, de même y peut-on imaginer une latitude d’accélération ou de ralentissement (latitudo intensionis et remissionis) selon laquelle un moteur peut accélérer ou ralentir son mouvement avec une vitesse ou une lenteur variable à l’infini. Cette lalitude-là se comporte à l’égard de la latitude du mouvement comme le mouvement se comporte à l’égard de la grandeur ou quantité qui est susceptible d’être parcourue successivement d’une manière vraiment continue (Et illa latitudo consimiliter se habet respecta latitudinis motus sicut se habet motus respectu magnitudinis et quantitatis continuæ vere pertransibilis successive). »

On définit souvent l’accélération comme la vitesse de la vitesse ; par là, on ne fait que reprendre l’idée que nous venons d’entendre exprimer par Guillaume Heytesbury.


D. Les Probationes conclusionum.


Les plus importantes, parmi les propositions que Guillaume Heytesbury a invoquées au cours de ses Regulæ, sont démontrées, nous l’avons dit, dans un opuscule intitulé Probationes conclusionum in regulis positarum ; ainsi en est-il, en particulier, de la proposition qui nous occupe. La démonstration exposée à cette occasion[1] est, à peu près, la première qu’ait donnée Dumbleton, celle qu’il mêlait aux considérations sur l’intensité des formes ; elle est aussi peu probante que cette dernière.

D’ailleurs, à l’imitation des Regulæ solvendi sophismata, les Probationes conclusionum ne parlent jamais d’un mouvement uniformément difforme, mais d’un mouvement dont l’intensité croît uniformément (uniformiter intenditur), ni d’une latitude uniformément. difforme, mais d’une latitudo uniformiter acquisita vel deperdita ; l’idée d’accélération est évidemment familière à l’auteur.

  1. Gulielmi Hentisberi Probationes conclusionum in regulis positerum. Conclusiones declarative de motu locali, cap. I, art. 9 (Tractatus Gulielmi Hentisberi de sensu composite et diviso… Venetiis 1494 ; fol. 198, col. d, et fol. 199, col. a).