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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

À fa fin de l’édition dont nous venons de parler[1], se trouve un écrit intitulé : Præclarissimi viri ac subtilissimi sophistæ Gulielmi Hentisberi probationes profundissimæ conclusionum, in regulis positarum. Comme l’indique le titre, cet écrit a pour objet de démontrer un certain nombre de conclusions simplement énoncées ou simplement prouvées dans les Regulæ solvendi sophismata. Que William Heytesbury se soit ainsi appliqué à se commenter lui-même, la chose est quelque peu surprenante. Ce qui n’est pas moins surprenant, c’est que ni par les termes employés ni par la tournure de la pensée, les Probationes ne rappellent les ouvrages authentiques d’Heytesbury non plus que les autres écrits émanés de l’École d’Oxford ; elles rappellent bien plutôt le langage et la manière de raisonner qui avaient cours à l’Université de Paris au temps d’Albert de Saxe et de Marsile d’Inghen. Déjà, nous en avons fait la remarque[2] et nous aurons l’occasion de la renouveler. Il nous semble probable que les Probationes conclusionum sont un commentaire parisien sur le principal traité d Heytesbury.

Au début du traité De insolubilibus, qui ouvre les Regulæ, Heytesbury énumère[3] trois opinions relatives à la nature des sophismes ; ces opinions, il n’en nomme pas les auteurs, car aucun nom ne se trouve jamais sous sa plume ; mais Gaëtan de Tiène, commentant les Regulæ, nous fait connaître ces noms[4] : « La première de ces positions, dit-il, est celle de Suisset ; la seconde est admise par Dulmenton, la troisième est de Richard Clienton en ses Sophismata. »

Suisset, Dulmenton, Richard Clienton, voilà donc trois noms de logiciens qui furent, à n’en pas douter, parmi les prédécesseurs d’Heytesbury. Que savons-nous de ces hommes experts en subtile dialectique ?

« Ce Clienton nous est totalement inconnu », écrit Prantl[5] Prantl était mal renseigné ; nous possédons le texte manuscrit des Sophismata auxquels Heytesbury et Gaëtan de Tiène faisaient allusion ; à la vérité, l’auteur se nommait Clymeton et non Clienton. Le scribe qui, après avoir copié les Sophismata d’Albert de Saxe, et avant de reproduire les derniers Sophismata d’Heytesbury, a transcrit les Sophismata de Clymeton, en un cahier aujourd’hui

  1. Éd, cit., fol. 188, col. c, à fol. 203, col. d.
  2. Chapitre I, § 6, pp. 86 et 87.
  3. Hentisberi De insolubilibus ; éd. cit., fol. 4, col. c.
  4. Gaetani de Thienis Vicentini In regulas Gulielmi Hesburi recollecte ; éd. cit., fol. 7, col. c.
  5. Carl Prantl, Geschichte der Logik im Abendlande, IVter Bd., p. 90.