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L’INFINIMENT PETIT ET L’INFINIMENT GRAND

minimum ; cela est évident, car la forme de la chair est divisible et les parties de cette forme s’engendrent l’une après l’autre ; dès lors, cette forme ne sera jamais tirée d’une quantité de matière si petite qu’on ne puisse, d’une matière moindre encore, tirer une forme de chair encore plus petite ; dès lors, en vertu de la définition même du mot minimum, on ne peut assigner de minimum à cette matière ; il en résulte que l’on ne peut assigner de minimum au volume sous lequel de la chair peut être engendrée.

» Seconde conclusion. — On ne peut assigner de minimum à une matière telle que de sa puissance, on puisse tirer une forme de chair suffisante pour que le composé de cette forme et de cette matière soit appelé de la chair. Prouvons-le : Si l’on donne une quantité de matière suffisante à cet objet, une quantité plus petite que celle-là y suffira encore, car n’importe quelle partie y suffit ; la chair, en effet, est une substance homogène dont toute partie reçoit le même nom que le tout ; toute partie de chair est de la chair ; c’est en cela que les substances homogènes diffèrent des substances hétérogènes.

» Troisième conclusion. — On peut assigner un minimum à la quantité de chair qui, en un milieu déterminé d’une manière spéciale et circonstanciée, ne tend pas à sa propre corruption. Cela est évident. Supposons, en effet, que la puissance [de conservation] d’une certaine masse de chair soit 2 et que cette chair se trouve dans un milieu de force 2 qui lui est contraire ; cette chair est dans ce milieu et elle y reste sans tendre à sa corruption, car il se trouve que sa résistance est aussi grande que l’activité du milieu ambiant ; mais si l’on donnait une masse de chair quelconque plus petite que celle-là, elle ne pourrait demeurer dans ce même milieu sans tendre à sa propre corruption, car sa puissance serait surpassée par celle du milieu ; la première chair était donc la masse minimum de chair qui puisse, sans tendance à la corruption, demeurer en un tel milieu.

» Quatrième conclusion. — Si l’on parle du milieu d’une manière absolue, [et non pas d’un milieu désigné d’une façon circonstanciée] On ne peut pas, à la masse de chair capable d’exister en ce milieu sans tendre à sa propre corruption, assigner de minimum. Prouvons-le : Si l’on donne une masse de chair qui, en un certain milieu, ne tende pas à sa corruption on pourra toujours donner une masse de chair plus petite qui ne tende pas non plus à sa corruption, pourvu qu’on la place au besoin en un milieu moins actif. Soit, par exemple, une chair de grandeur 2 qui, dans un