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LA LATITUDE DES FORMES. ORESME ET SES DISCIPLES

une objection qu’il faut examiner. Marsile a soin de formuler[1] cette objection : « La blancheur uniformément difforme n’est pas plus intense que son degré moyen. » Cette objection sommairement écartée, la question traitée par notre auteur se trouve extrêmement semblable, par le fond comme par la forme, au Tractatus proportionum d’Albert de Saxe.

Les diverses indications que nous venons de recueillir nous montrent qu’au temps où Nicole Oresme, évêque de Lisieux, vivait ses derniers jours, l’usage des coordonnées rectangulaires, qu’il avait imaginé et recommandé, s’était répandu dans les écoles de Paris ; en particulier, la règle relative aux latitudes uniformément difformes, que justifiait l’emploi de ces coordonnées, était couramment invoquée dans les discussions de Physique.

En la personne d’Henri Heynbuch, du village de Langenstein, dit aussi Henri de Hesse[2], nous allons trouver un adepte particulièrement convaincu des pensées qu’Oresme avait émises.


IV
L’influence de Nicole Oresme à l’Université de Paris (suite).
Henri de Langenstein et les qualités occultes.


En 1363, Henricus de Hassia, membre de la Nation Anglaise de l’Université de Paris, est admis au serment[3] que devait prêter tout candidat à la déterminance ; il passe cet examen devant Maître Hermann, Consul de Cologne. La même année[4], aux examens de Sainte-Geneviève, il conquiert le titre de licencié.

C’était un bien pauvre étudiant ; la mention de son examen de licence est suivie des mots : cujus bursa nihil ; c’est-à-dire que sa famille ne lui servait aucune pension ; aussi, le 2 juin 1363[5],

  1. Questiones subtilissime Johannis Marcili Inguen ; super octo libros Physicorum secundum nominalium viam. Lib. VI, quæst. V : Utrum velocitas motus sit attendenda penes spatium in tante temore pertransitum.
  2. Le nom de ce maître paraît fort souvent au Chartularium Universitatis Parisiensis et au Liber procuratorum Nationis Anglicanæ ; il y figure toujours sous les formes : Henricus de Hassia, Henricus Hembuch, Heynbuch ; jamais il ne prend la forme : Henri de Langenstein (Denifle et Châtelain, Auctorium Chartularii Universitatis Parisiensis, I. Liber procuratorum Nationis Anglicananæ, t. I, p. xlii, en note).
  3. Denifle et Châtelain, Auctarium Chartularii Universitatis Parisiensis. Liber procuratorum Nationis Anglicanæ. Tomus I (MCCCXXXIII MCCCCVI), col. 279.
  4. Op. laud., col. 284.
  5. Op. laud., col. 285.